La foi que j’aime le mieux, dit Dieu, c’est l’espérance.
La foi, ça ne m’étonne pas.
Ça n’est pas étonnant.
J’éclate tellement dans ma création.
La charité, dit Dieu, ça ne m’étonne pas.
Ça n’est pas étonnant.
Ces pauvres créatures sont si malheureuses qu’à moins d’avoir un coeur de pierre, comment n’auraient-elles point charité les unes des autres.
Mais l’espérance, dit Dieu, voilà ce qui m’étonne.
Moi-même.
Ça c’est étonnant.
Que ces pauvres enfants voient comme tout ça se passe et qu’ils croient que demain ça ira mieux.
Qu’ils voient comme ça se passe aujourd’hui et qu’ils croient que ça ira mieux demain matin.
Ça c’est étonnant et c’est bien la plus grande merveille de notre grâce.
Et j’en suis étonné moi-même.
Quelle ne faut-il pas que soit ma grâce
et la force de ma grâce pour que cette petite espérance, vacillante au souffle du péché,
tremblante à tous les vents,
anxieuse au moindre souffle,
soit aussi invariable,
se tienne aussi fidèle, aussi droite, aussi pure ;
et invincible, et immortelle, et impossible à éteindre
que cette petite flamme du sanctuaire.
qui brûle éternellement dans la lampe fidèle.
Charles Péguy, La petite Espérance.