Saint-Eugène, le Samedi Saint 4 avril 2015, vigile pascale de 21h00.
- Traits en plain-chant
- Au retours des fonts baptismaux: Tibi laus perennis, Auctor – “l’hymne du retour des fonts” des manuscrits de l’antique liturgie parisienne – texte de saint Venance Fortunat (c. 535 † c. 601), évêque de Poitiers.
- Kyrie & Gloria : Messe pour le Samedy de Pasques (H. 8) de Marc-Antoine Charpentier (1643 † 1704), maître de la musique de la Sainte Chapelle
- Offertoire : O filii et filiæ – offertoire d’orgue pour le Samedy de Pâques – Jean-François d’Andrieu (1682 † 1738), organiste de Saint-Barthélémy et du Roi à Versailles
- Sanctus & Benedictus : Messe pour le Samedy de Pasques (H. 8) de Marc-Antoine Charpentier
- Pendant la communion :
Alleluia, Hæc dies, petit motet à deux voix et instrument extrait des Cantica Sacra (1652) d’Henry du Mont (1610 † 1684), maître de la chapelle du roi Louis XIV, organiste de Saint-Paul et du duc d’Anjou
Canon pascal de Saint-Jean Damascène (VIIIème siècle) – 1ère ode. Polyphonie d’après Maxime Kovalevsky (1903 † 1988) - Au dernier évangile : Regina cœli – mise en polyphonie d’après Charles de Courbes (1622)
- Procession de sortie : Cantilène pascale O filii et filiæ – mélodie du XIIIème siècle, paroles de Jehan Tisserant (XVème siècle), harmonisation Henri de Villiers.
Bonjour,
D’abord, merci de cette cérémonie «marathonesque».
J’ai remarqué des changements dans le cérémonial par rapport aux années passées.
Notamment la place du cierge pascal, la lecture des prophéties lumières allumées, la bénédiction de l’eau baptismale à l’autel, etc. Pouvez-vous m’éclairer SVP ?
Bonjour Jérôme,
Vous avez effectivement pu remarquer quelques différences dans le cérémonial par apport à l’année passée.
Nous suivons toujours le rite de la Semaine Sainte tel que réformé en 1955 (un peu avant même s’agissant de la vigile pascale), qui est celui que nous demande de suivre le motu proprio Summorum pontificum puisqu’il renvoie aux livres en vigueur en 1962.
Cependant, il nous a paru bénéfique, pour certains points purement “cérémoniels” et ne formant pas le cœur de la réforme de 1955, de nous aider des rubriques antérieures, afin que la cérémonie soit fluide et que son déroulé réponde de façon cohérente aux formes liturgiques employées le reste de l’année (beaucoup des rubriques de la Semaine Sainte réformée préparaient un changement plus global de la liturgie qui a attendu les réformes conciliaires pour opérer pleinement).
Ainsi, ces éléments ne vous ont pas échappé :
– La procession du Lumen Christi marchait dans un ordre cohérent de procession et non dans l’ordre sui generis prévu par les nouvelles rubriques : sous-diacre, diacre, prêtre, clergé en cortège (le plus digne en premier). L’arrivée dans les stalles s’est ainsi faite de façon moins chaotique que d’autres années.
– Le cierge pascal était à sa place définitive sur son candélabre, placé du côté de l’évangile au pied des marches de l’autel, où il restera jusqu’à l’Ascension. Dans le nouveau rite, il doit normalement être provisoirement placé au milieu du chœur jusqu’au début de la messe, ce qui entraine une reconfiguration totale de l’espace liturgique autour de lui pendant tout le temps de la veillée pascale. Outre que cela brise l’orientation normale du sanctuaire où l’autel occupe toujours la place centrale, cette disposition n’est praticable dans le minuscule chœur de Saint-Eugène qu’au prix de mouvements compliqués pour les nombreux rites précédant la messe.
– L’Exultet a été chanté au lieu habituel du chant de l’évangile, le diacre ayant été béni à l’autel. Ce texte a en effet toujours eu droit aux honneurs dus aux Evangiles, ce qui se manifeste dans la personne qui le chante, le lieu où il se chante et les cérémonies qui accompagnent son chant.
– Les prophéties ont été chantées sur un pupitre nu tourné vers l’autel (comme le sont toutes les lectures autres que l’évangile), le célébrant et ses ministres étant en chasuble et manipules et les oraisons étant chantées à l’autel, selon la forme habituelle que l’on retrouve, notamment, à toutes les messes des quatre temps. Dans la nouvelle forme, l’Exultet comme les prophéties sont chantés contre le cierge côté épitre, donc tourné vers le nord, ce qui implique une certaine dévalorisation relative du premier par rapport aux secondes, chantées comme jamais une lecture de l’ancien testament de l’est durant l’année. Il faut ajouter que, dans le chœur de Saint-Eugène, les autres années, l’espace entre le lieu de chant des prophéties et celui des oraisons (debout devant le banquette, un clerc tenant le livre) était très étroit, ce qui n’était pas sans inconvénients.
– S’agissant de la bénédiction de l’eau, le bon sens naturel et l’usage traditionnel veulent qu’elle soit faite au baptistère, d’où l’eau ne bougera pas et où seront célébrés tous les baptêmes. Cela s’était notamment fait il y a cinq ans. M. le curé tient cependant à ce que la bénédiction soit faite au chœur, ainsi que les baptêmes, afin que toute la communauté paroissiale puisse assister visuellement à ce sacramental et à ce sacrement. Dès lors, il a paru plus naturel et conforme à l’esprit global de la liturgie de bénir la cuve baptismale à l’autel, de même que les cierges de la chandeleur, les cendres et les rameaux, plutôt que face au peuple, sur une table placée au milieu du chœur. Du reste, la cuve, placée contre l’autel, en haut des degrés, était de fait plus visible des fidèles.
– Les lumières de l’église sont normalement allumées à l’Exultet, dans l’ancien comme dans le nouveau rite. L’usage de tout allumer au Gloria de la messe est un usage contraire visant à théâtraliser de façon éclatante ce moment du retour des cloches et des images de saints. Ce déplacement dévalorise l’Exultet (les réformateurs n’ont voulu une église éclairée à la bougie que pendant ce chant à la gloire de la lumière pascale) et implique concrètement de se passer de la lumière normalement suffisante pour les prophéties, la (longue) bénédiction de l’eau, les neuf baptêmes et le complexe changement de couleurs de l’autel avant la messe. Les marathons couru la nuit occasionnent malheureusement plus de blessures que ceux qui sont organisés de jour. Ici, nous nous sommes inspiré des anciennes rubriques qui prévoient l’allumage des lampes de l’église à partir du feu nouveau après les paroles “apis mater eduxit”, le chant du diacre s’interrompant.
Ne nous trompons pas, le rite suivi est bien celui de Pie XII et non une forme mixte : le cierge pascal a été béni sur le parvis et porté processionnellement à travers l’église, les prophéties étaient au nombre de quatre, bénédiction de l’eau et baptêmes ont été faits au chœur, il y a eu renouvellement des promesses baptismales, la communion était suivie du chant abrégé des laudes, non des vêpres.
Nous avons simplement réajusté certaines choses de façon à rendre la cérémonie d’ensemble cohérente avec le rite global de l’année liturgique, et pour ce-faire, nous avons regardé les rubriques antérieures afin de ne pas commettre de faux sens.
Vous avez sans doute également remarqué le chant du levate par le sous-diacre, l’imposition de l’encens précédant l’aspersion lors des bénédictions diverses ou la récitation des prières au bas de l’autel : autant d’applications de l’usage traditionnel et habituel.
D’un avis assez général (et de celui de notre curé en particulier), le cérémonial observé jusqu’à la messe a été perçu comme fluide et cohérent, ce que le groupe des grands clercs perçoit de façon encourageante !
Martin J.
Bonjour,
Je viens de découvrir la réponse à ma question car il semble que je n’ai pas reçu de notification.
Donc, je remercie infiniment Martin d’avoir pris soin de me répondre de façon complète.
Que le Seigneur vous bénisse tous.
Jérôme.