L’Oraison de Jérémie (Lamentations, 5, 1-11) est la dernière des 9 Lamentations chantées au cours de la Semaine Sainte, la troisième leçon donc du premier nocturne des Ténèbres du Samedi Saint.
La musique ci-dessus, qui rend tout particulièrement bien le drame du texte de Jérémie, a été composée au début du XVIIIème siècle par M. Chabert, maître de chapelle et organiste de la collégiale Saint-Agricol d’Avignon. M. Chabert avait mis en plain-chant figuré le cycle complet des 9 Lamentations de Jérémie, celles-ci ont connu un succès certain au-delà d’Avignon. Les éditions avignonnaises du XIXème siècle qui les donnent assez communément me paraissent avoir cherché à trop transcrire l’ornementation usuelle du chant au point de rendre difficile la lecture des Lamentations de Chabert. Aussi ai-je transcrit cette ultime Lamentation depuis un manuscrit langrois dont le chant, plus dépouillé, est vraisemblablement proche de l’original du XVIIIème siècle.
Traduction de cette Lamentation par M. l’Abbé de Bellegarde :
Le commencement de la Prière du Prophète Jérémie.
Seigneur, souvenez-vous de ce qui nous est arrivé ; regardez & voyez l’opprobre où nous sommes ; notre héritage est tombé entre les mains des étrangers. Nous sommes devenus orphelins sans père : nos mères sont comme des veuves : nous avons bu l’eau à prix d’argent : nous avons acheté chèrement le bois : on nous a entraînés la corde au col, sans nous donner aucun relâche dans nos fatigues : nous avons tendu la main aux Egyptiens & au Assyriens, pour avoir du pain. Nos pères ont péché, & ils ne sont plus, & nous avons porté la peine de leurs iniquités : des esclaves sont devenus nos maîtres : il ne s’est trouvé personne pour nous délivrer de leurs mains. Nous allions chercher notre pain, en exposant notre vie aux épées dans le désert : notre peau s’est brûlée & noircie par la faim excessive, comme si elle eut été dans un four. Ils ont humilié les femmes dans Sion, & les vierges dans les villes de Juda.
Jérusalem, Jérusalem, convertissez-vous au Seigneur votre Dieu.