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Retrouvez les partitions que nous éditons, classées par temps liturgique ou par compositeur. Elles sont téléchargeables gracieusement.

Antoine de Boësset – Ad cœnam Agni providi – Hymne du temps pascal

Attribuable à Antoine de Boësset, sieur de Villedieu (1587 † 1643).
Maître de la musique de la Reine.
Ad cœnam Agni providi, hymne du Temps pascal, à vêpres.
4 voix (SATB).
4 pages – Ré mineur (Ier ton).

Cette hymne pour le Temps pascal – Ad cœnam Agni providi – figure au verso du folio 211 du manuscrit « Deslauriers », fameux manuscrit de la Bibliothèque nationale de France (F-Pn / Rés Vma ms 571) qui pourrait avoir été le répertoire personnel d’André Péchon, maître de chapelle de la cathédrale de Meaux au XVIIème siècle, dans lequel celui-ci aurait consigné les œuvres des compositeurs qu’il admirait tout particulièrement.

Dans ce manuscrit, fondamental pour la connaissance de la musique française au temps de Louis XIII, un corpus de pièces se détachent très nettement par leur style et leur composition vocale insolite (le plus souvent 3 voix de femmes, basse & basse continue). En marge de certaines de ces œuvres, le copiste a indiqué le nom de Boësset.

L’attribution plus précise de ces œuvres a entraîné une dispute entre musicologues (et ce dès Sébastien de Brossard au XVIIIème siècle) : ces œuvres devaient-elles être attribuées à Antoine de Boësset, sieur de Villedieu (1587 † 1643), surintendant de la Musique du Roi Louis XIII, maître de la musique d’Anne d’Autriche et des bénédictines de Montmartre, ou bien à son fils Jean-Baptiste de Boësset, écuyer, sieur de Dehaut (1614 † 1685) qui occupa les mêmes fonctions à la cour que son père, étant de plus gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi ? La question parait définitivement tranchée en faveur du père depuis l’article que Peter Bennett fit paraître en 2005 dans la Revue française de Musicologie : Antoine Boësset’s sacred music for the royal abbey of montmartre : Newly identified polyphony and plain-chant musical from the « Deslauriers » Manuscript (F-Pn Vma ms. rés. 571). Se fondant sur une datation des différents papiers du manuscrit Deslauriers et sur la reprise des thèmes du plain-chant propre à Montmartre, l’auteur montre de façon convaincante le lien entre ce corpus et les bénédictines de Montmartre et dès lors son attribution au père (plus connu par ailleurs pour ses nombreux airs de cours publiés).

L’inédite répartition des voix dans ce corpus (deux dessus, un bas dessus, une basse, avec la basse continue) s’expliquerait donc par un usage dans un monastère féminin (la basse serait chantée par Boësset selon Peter Bennett (?!). Pourtant plusieurs musicologues s’étaient aperçus que si l’on répartissait les voix autrement, la marche harmonique de ces œuvres sonnaient nettement mieux. Denise Launay en particulier préconisait la mutation du second dessus en taille, ce que nous avons suivi ici pour cette transcription (et en effet, cela sonne parfaitement bien ainsi). En transcription moderne, il ne serait de toutes manières pas difficile de lire la partie de ténor par un soprano 2 et vice-versa.

Ad cœnam Agni providi - manuscrit Deslauriers p. 211 v°
Ad cœnam Agni providi – manuscrit Deslauriers p. 211 v°

Nous pensons devoir attribuer à Antoine de Boësset cette œuvre :

  • elle figure dans une série de pièces (et en particulier d’hymnes polyphoniques) qui utilisent les clefs qu’on rencontre dans les œuvres marquées « Boësset » dans le manuscrit Deslauriers : deux clefs de sol de dessus, une clef d’ut première ligne de bas dessus et une clef de fa troisième ligne de basse chantante,
  • elle utilise très manifestement, dans l’alto, comme d’autres compositions de Boësset, le plain-chant en usage à Montmartre, tel que noté dans l’Antiphonier bénédictin pour les religieuses du royal & célèbre monastère de Mont-Martre imprimé chez Louis Sevestre en 1646, lors d’une importante réforme de simplification du chant opérée par les Bénédictines de Montmartre (page 493 – cf. aussi cet autre exemplaire) :
Ad cœnam Agni providi - chant de Montmartre de 1646
Ad cœnam Agni providi – chant de Montmartre de 1646

Nous offrons plus bas une partition du plain-chant de Montmartre adaptée à toutes les strophes de l’hymne, afin de permettre une alternance avec la polyphonie de Boësset pour ceux qui le souhaiteraient. On peut aussi alterner en utilisant la ligne du bas dessus (alto) comme plain-chant (ce que nous faisons dans la vidéo en fin de cet article).

L’hymne Ad cœnam Agni providi est employée par le rit romain comme par le rit bénédictin pour les vêpres du Temps pascal. Son auteur parait être saint Nicétas, évêque de Rémesiana en Dacie aurélienne (c. 335 – 414) ; il remonte en tout cas à une époque suffisamment antique, de la primitive Eglise, où les catéchumènes étaient baptisés adultes et étaient revêtus du vêtement blanc, comme le laisse entendre suffisamment clairement la première strophe. Le texte déploie le mystère pascal dans toute son ampleur : le Christ y est présenté comme l’Agneau de l’Exode, immolé pour sauver les siens, mais aussi comme le Seigneur ressuscité qui donne sa chair en nourriture dans l’Eucharistie. On y retrouve le style des premières hymnes latines, sobre, fortement typologique. En voici le texte avec une traduction versifiée de Charles de Courbes (Cantiques Spirituels, 1622).

 

Ad cœnam Agni providi,
Et stolis albis candidi,
Post transitum maris rubri
Christo canamus principi.
En mangeant cet Agneau pascal,
Vêtus de blanc, en cœur loyal,
Et la Mer rouge ayant passé
Chantons à Christ de cœur haussé.
Cujus corpus sanctissimum,
In ara crucis torridum,
Cruore ejus roseo
Gustando vivimus Deo.
Duquel le corps fut autrefois
Brûlé sur l’autel de la Croix,
Dont par le pur sang d’iceluy
Nous vivons à Dieu aujourd’hui.
Protecti Paschæ vespere
A devastante Angelo,
Erepti de durissimo
Pharaonis imperio.
Sauvés de l’Ange qui jadis
En la vieille Pâque des Juifs
Fit de plusieurs, occision
Et délivra de Pharaon.
Jam Pascha nostrum Christus est,
Qui immolatus agnus est,
Sinceritatis azyma,
Caro ejus oblata est.
Car notre Pâque c’est le Christ,
Qui pour nous vrai agneau se fit,
Aussi son cher corps a été
L’Azyme de sincérité.
O vere digna hostia,
Per quem fracta sunt tartara,
Redempta plebs captivata,
Reddita vitæ præmia.
Ô digne hostie, cher Jésus,
Par qui les enfers sont rompus,
Le peuple ôté d’anxiété,
Et remis en sa liberté.
Consurgit Christus tumulo,
Victor redit de barathro,
Tyrannum trudens vinculo,
Et Paradisum reserans.
Christ ressuscité glorieux
Est des enfers victorieux,
Et rompt de Satan les liens,
Ouvrant le Paradis aux siens.
Quæsumus, Auctor omnium,
In hoc paschali gaudio,
Ab omni mortis impetu
Tuum defende populum.
Nous te prions, grand Dieu de tous
Qu’en ce temps pascal gai et doux,
Tu nous pardonnes les péchés,
Dont à la mort serions tachés.
Gloria tibi Domine,
Qui surexist’ a mortuis
Cum Patr’ et Sancto Spiritu,
In sempiterna sæcula. Amen.
Gloire soit à toi, ô Sauveur,
Qui est ressuscité vainqueur,
Au Père, et Saint Esprit divin,
Aux siècles des siècles sans fin. Amen.

À la Renaissance, le texte original fut défiguré dans un latin classicisant, voire néo-païen, par une commission de quatre jésuites humanistes réunie par le pape Urbain VIII, donnant naissance à une nouvelle version : Ad regias Agni dapes. L’antique hymne pascale, si pleine de foi et de simplicité, fut mutilée dans son esprit et dans sa lettre, pour plaire de façon pédante au goût païen du jour. Le fidèle qui chantait jadis : Ad cœnam Agni providi, entendait l’appel du Christ, l’Agneau pascal, à sa cène, à son banquet sacré ; on lui substitua Ad regias Agni dapes, tournure majestueuse, sans doute, mais plus abstraite, et qui perdait tout le charme biblique et patristique propre au latin chrétien du texte ancien. Le nouvel hymnaire, refusé par les basiliques romaines, la plupart des ordres religieux et des diocèses français (et par conséquent des compositeurs de musique), ne pénétra notre pays qu’au début du XXème siècle avec les nouvelles éditions des livres de chant liturgique (notons que les premiers de ces livres parus à cette époque donnaient toujours le texte antique des hymnes en appendice).

 

Les premières mesures de cette partition :

 
Ad cœnam Agni providi - polyphonie d'Antoine de Boësset
 

Cliquer sur ce lien pour ouvrir & télécharger la partition de l’hymne Ad cœnam Agni providi d’Antoine de Boësset en fichier PDF – ton original en Ré mineur

Cliquer sur ce lien pour ouvrir & télécharger la partition de l’hymne Ad cœnam Agni providi selon le plain-chant des Bénédictines de Montmartre en fichier PDF – Ier ton

Ad cœnam Agni providi - plain-chant de Montmartre de 1646
Ad cœnam Agni providi – plain-chant de Montmartre de 1646

L’hymne de Boësset chanté à Saint-Eugène en 2016 :

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Antoine de Boësset – Jesu nostra redemptio – Hymne de l’Ascension (et O salutaris Hostia sur le même ton)

Attribuable à Antoine de Boësset, sieur de Villedieu (1587 † 1643).
Maître de la musique de la Reine.
Jesu nostra redemptio, hymne de l’Ascension (et O salutaris Hostia adapté sur le même ton).
4 & 5 voix (SATB, puis SATBB pour l’Amen final) et basse continue.
4 pages – Ré mineur (ou Ut mineur).

Cette hymne pour la fête de l’Ascension – Jesu nostra redemptio – figure dans un manuscrit de la Bibliothèque nationale de France connu sous le nom de manuscrit « Deslauriers » mais qui semble avoir été le répertoire personnel d’André Péchon, maître de chapelle de la cathédrale de Meaux au XVIIème siècle, dans lequel celui-ci a consigné les œuvres des compositeurs qu’il admirait tout particulièrement. Dans ce manuscrit, fondamental pour la connaissance de la musique française au temps de Louis XIII, un corpus de pièces se détachent très nettement par leur style et leur composition vocale insolite (le plus souvent 3 voix de femmes, basse & basse continue). En marge de certaines de ces œuvres, le copiste a indiqué Boësset. L’attribution plus précise de ces œuvres a entraîné une vieille dispute entre musicologues (et ce dès Sébastien de Brossard au XVIIIème siècle) : ces œuvres devaient-elles être attribuées à Antoine de Boësset, sieur de Villedieu (1587 † 1643), surintendant de la Musique du Roi Louis XIII, maître de la musique d’Anne d’Autriche et des bénédictines de Montmartre, ou bien à son fils Jean-Baptiste de Boësset, écuyer, sieur de Dehaut (1614 † 1685) qui occupa les mêmes fonctions que son père à la cour où il fut également gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi ? La question parait définitivement tranchée en faveur du père depuis l’article que Peter Bennett fit paraître en 2005 dans la Revue française de Musicologie : Antoine Boësset’s sacred music for the royal abbey of montmartre : Newly identified polyphony and plain-chant musical from the « Deslauriers » Manuscript (F-Pn Vma ms. rés. 571). Se fondant sur une datation des différents papiers du manuscrit Deslauriers et sur la reprise des thèmes du plain-chant propre à Montmartre, l’auteur montre de façon convaincante le lien entre ce corpus et les bénédictines de Montmartre et dès lors son attribution au père (plus connu par ailleurs pour ses nombreux airs de cours publiés).

L’inédite répartition des voix dans ce corpus (deux dessus, un bas dessus, une basse, avec la basse continue) s’expliquerait donc par un usage dans un monastère féminin (la basse serait chantée par Boësset selon Peter Bennett (?!). Pourtant plusieurs musicologues s’étaient aperçus que si l’on répartissait les voix autrement, la marche harmonique de ces œuvres sonnaient nettement mieux. Denise Launay en particulier préconisait la mutation du second dessus en taille, ce que nous avons suivi ici pour cette transcription (et en effet, cela sonne parfaitement bien ainsi). En transcription moderne, il ne serait de toutes manières pas difficile de lire la partie de ténor par un soprano 2 et vice-versa.

Voici un très bel enregistrement par l’excellent ensemble Correspondes sous la direction de Sébastien Daucé :

L’hymne Jesu nostra redemptio est employée par le rit romain pour les premières et secondes vêpres, ainsi que pour les laudes de la fête de l’Ascension de Notre Seigneur Jésus-Christ, ainsi que pendant toute son octave. Son texte, établi sur le modèle des hymnes ambrosiennes classiques, remonte au moins au VIIème siècle.

Nous donnons deux versions de cette partition : en ré mineur (ton original) ou en ut mineur majeur. Nous adjoignons également un O salutaris Hostia adapté sur la polyphonie d’Antoine de Boësset, qui pourra être employé pour l’Ascension et son octave.
 

Jesu, nostra redémptio,
Amor et desidérium,
Deus Creátor ómnium,
Homo in fine témporum.
O Jésus ! notre Rédemption !
Divin objet de notre amour et de nos désirs,
Dieu, qui étant le créateur de tous les êtres,
Vous êtes fait homme à la fin des temps.
Quæ te vicit cleméntia,
Ut ferres nostra crímina,
Crudélem mortem pátiens,
Ut nos a morte tólleres !
Quel excès de clémence et de bonté
Vous a fait prendre nos crimes sur nous,
Et souffrir la plus cruelle mort
Pour nous sauver nous-mêmes de la mort !
Inférni claustra pénetrans,
Tuos captívos rédimens,
Victor triúmpho nóbili
Ad dextram Patris résidens :
Vous êtes descendu dans les enfers,
D’où vous avez retiré vos captifs ;
Vainqueur et triomphant, vous êtes monté au ciel
Où vous êtes assis à la droite de votre Père.
Ipsa te cogat píetas,
Ut mala nostra súperes
Parcénd(o), et voti cómpotes
Nos tuo vultu sáties.
Que votre miséricorde vous engage
A nous délivrer de nos maux,
En nous accordant le pardon : rassasiez enfin
Notre désir en nous faisant voir votre face.
Tu esto nostrum gáudium,
Qui es futúrus præmium :
Sit nostra in te glória
Per cuncta semper sæcula. Amen.
Soyez ici-bas toute notre joie,
Vous qui devez être notre récompense dans le ciel
Que nous ne mettions notre gloire qu’en vous
Maintenant et dans toute l’éternité. Amen.

 

O salutáris Hóstia,
Quæ cœli pandis óstium :
Bella premunt hostília,
Da robur, fer auxílium.
Ô victime salutaire,
Qui nous ouvres la porte du ciel,
L’ennemi nous livre la guerre,
Donne-nous force, porte-nous secours.
O vere digna Hóstia,
Spes única fidélium :
In te confídit Fráncia,
Da pacem, serva lílium.
Ô vraiment digne Hostie
Unique espoir des fidèles,
En toi se confie la France,
Donne-lui la paix, conserve le lys.
Uni trinóque Dómino
Sit sempitérna glória :
Qui vitam sine término
Nobis donet in pátria. Amen.
Au Seigneur un et trine
Soit la gloire sempiternelle ;
Qu’il nous donne dans la patrie
La vie qui n’aura point de terme. Amen.

 

Les premières mesures de ces deux partitions :

 
Jesu nostra Redemptio - hymne de l'Ascension par Antoine de Boësset
 
O salutaris hostia sur Jesu nostra Redemptio d'Antoine de Boësset

 
Cliquer sur ce lien pour ouvrir & télécharger la partition de l’hymne Jesu nostra redemptio en fichier PDF – ton original en Ré mineur
Cliquer sur ce lien pour ouvrir & télécharger la partition de l’hymne Jesu nostra redemptio en fichier PDF – ton transposé en Ut mineur
Cliquer sur ce lien pour ouvrir & télécharger la partition de l’O salutaris hostia sur l’hymne Jesu nostra redemptio en fichier PDF – ton original en Ré mineur
Cliquer sur ce lien pour ouvrir & télécharger la partition de l’O salutaris hostia de l’hymne Jesu nostra redemptio en fichier PDF – ton transposé en Ut mineur

 

O salutaris hostia sur Jesu nostra Redemptio d'Antoine de Boësset
 
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Antoine de Boësset – Premier Te Deum

Attribuable à Antoine de Boësset, sieur de Villedieu (1587 † 1643).
Maître de la musique de la Reine.
Premier Te Deum.
4 voix (SATB ou SSAB) et basse continue.
12 pages – Ut majeur (ou Si bémol majeur).

Ce magnifique Te Deum a quatre voix figure dans un manuscrit de la Bibliothèque nationale de France connu sous le nom de manuscrit « Deslauriers » mais qui semble avoir été le répertoire personnel d’André Péchon, maître de chapelle de la cathédrale de Meaux au XVIIème siècle, dans lequel celui-ci a consigné les œuvres des compositeurs qu’il admirait tout particulièrement. Dans ce manuscrit, fondamental pour la connaissance de la musique française au temps de Louis XIII, un corpus de pièces se détachent très nettement par leur style et leur composition vocale insolite (le plus souvent 3 voix de femmes, basse & basse continue). En marge de certaines, le copiste a indiqué Boësset. L’attribution plus précise de ces œuvres a entraîné une vieille dispute entre musicologues (et ce dès Sébastien de Brossard au XVIIIème siècle) : ces œuvres devaient-elles être attribuées à Antoine de Boësset, sieur de Villedieu (1587 † 1643), surintendant de la Musique du Roi Louis XIII, maître de la musique d’Anne d’Autriche et des bénédictines de Montmartre, ou bien à son fils Jean-Baptiste de Boësset, écuyer, sieur de Dehaut (1614 † 1685) qui occupa les mêmes fonctions que son père à la cour où il fut également gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi ? La question parait définitivement tranchée en faveur du père depuis l’article que Peter Bennett fit paraître en 2005 dans la Revue française de Musicologie : Antoine Boësset’s sacred music for the royal abbey of montmartre : Newly identified polyphony and plain-chant musical from the « Deslauriers » Manuscript (F-Pn Vma ms. rés. 571). Se fondant sur une datation des différents papiers du manuscrit Deslauriers et sur la reprise des thèmes du plain-chant propre à Montmartre, l’auteur montre de façon convaincante le lien entre ce corpus et les bénédictines de Montmartre et dès lors son attribution au père (plus connu par ailleurs pour ses nombreux airs de cours publiés).

L’inédite répartition des voix dans ce corpus (deux dessus, un bas dessus, une basse, avec la basse continue) s’expliquerait donc par un usage dans un monastère féminin (la basse serait chantée par Boësset selon Peter Bennett (?!)). Pourtant plusieurs musicologues s’étaient aperçus que si l’on répartissait les voix autrement, la marche harmonique de ces œuvres sonnaient nettement mieux. Denise Launay en particulier préconisait la mutation du second dessus en taille, ce que nous avons suivi ici pour cette transcription (et en effet, cela sonne parfaitement bien ainsi). En transcription moderne, il ne serait de toutes manières pas difficile de lire la partie de ténor par un soprano 2. Nous donnons deux versions de cette partition : en ut majeur (ton original) ou en si bémol majeur. La version en ut majeur prise en la 415 parait être idéale.

Le Te Deum est un chant liturgique joyeux chanté à la fin de l’office nocturne les jours de fête. Il a été aussi employé pour rendre grâce à Dieu lors de circonstances extraordinaires. Deux Te Deum à 4 voix figurent l’un à la suite de l’autre dans le manuscrit Deslauriers. Nous donnons en transcription le premier d’entre eux, écrit « en musique », admirable en vitalité et en intentions musicales. Le second Te Deum du manuscrit Deslauriers présente des versets polyphoniques à alterner avec le plain-chant. Peter Bennett estime, au vu du contexte des autres œuvres autour de ces deux pièces dans le manuscrit Deslauriers, que ces Te Deum purent être utilisés pour des professions solennelles au Monastère de Montmartre.

Il n’est pas facile de mettre en musique le texte long du Te Deum. Le nombre important des versets pourrait induire un morcellement des idées musicales, écueil dans lequel ne tombe pas Boësset. Les signes de mesures sont alternativement le C & le C barré. Ils indiquent un changement de vitesse (plus qu’un changement de battue : il convient sans doute de battre toute l’œuvre à deux temp, vif ou long donc en alternance). Le C barré indique en effet un rythme plus lent (il est employé notamment pour tous les passages recueillis et ceux où la liturgie impose une inclinaison (« Sanctus, Sanctus, Sanctus ») ou un agenouillement (« Te ergo quæsumus »). Nous avons aussi indiqué l’alternance entre solistes & chœur, fortement suggérée par l’écriture musicale, en employant une convention éditoriale en usage au XVIIème siècle : les parties solistes sont en caractères italiques, les parties chorales en caractères droits.

Pour mémoire voici le texte du Te Deum, qui remonte pour sa première partie (peut-être une anaphore eucharistique primitive) au IVème siècle, sa seconde partie est tout aussi ancienne et comprend des versets qui étaient communs à plusieurs offices & que se sont agrégés au Te Deum.

Te Deum laudámus: te Dominum confitémur.
Te ætérnum Patrem, omnis terra venerátur.
Tibi omnes Ángeli, tibi Cæli et universæ Potestátes:
Tibi Chérubim et Séraphim incessábili voce proclámant:
(Fit reverentia) Sanctus, Sanctus, Sanctus, Dóminus Deus Sábaoth.
Pleni sunt cæli et terra majestátis glóriæ tuæ.
Te gloriósus Apostolórum chorus,
Te Prophetárum laudábilis númerus,
Te Mártyrum candidátus laudat exércitus.
Te per orbem terrárum sancta confitétur Ecclésia:
Patrem imménsæ majestátis;
Venerándum tuum verum et unícum Fílium;
Sanctum quoque Paráclitum Spíritum.
Tu Rex glóriæ, Christe.
Tu Patris sempitérnus es Fílius.
Tu, ad liberándum susceptúrus hóminem,
non horruísti Vírginis úterum.
Tu, devícto mortis acúleo,
aperuísti credéntibus regna cælórum.
Tu ad déxteram Dei sedes, in glória Pátris.
Judex créderis esse ventúrus.
Sequens versus dicitur flexis genibus.
Te ergo quæsumus, tuis fámulis subveni, quos pretióso sánguine redemísti.
Ætérna fac cum Sanctis tuis in glória numerári.
Salvum fac pópulum tuum, Dómine, et bénedic heréditati tuæ.
Et rege eos, et extólle illos usque in ætérnum.
Per síngulos dies benedícimus te;
Et laudámus nomen tuum in sæculum, et in sæculum sæculi.
Dignáre, Dómine, die isto sine peccáto nos custodíre.
Miserére nostri, Dómine, miserére nostri.
Fiat misericórdia tua, Dómine, super nos, quemádmodum sperávimus in te.
In te, Dómine, sperávi: non confúndar in ætérnum.
C’est toi, Dieu, que nous louons,
c’est toi, Seigneur, que nous confessons.
C’est toi, Père éternel, que toute la terre vénère.
C’est toi que tous les Anges,
c’est toi que les cieux & toutes les puissances,
c’est toi que les Chérubins & Séraphins, d’une voix incessante proclament :
(On s’incline pendant le Trisaghion) Saint, Saint, Saint, le Seigneur Dieu des Armées.
Ciel & terre sont pleins de la majesté de ta gloire.
C’est toi que le glorieux chœur des Apôtres,
c’est toi que la vénérable multitude des Prophètes,
c’est toi que l’éclatante armée des Martyrs,
c’est toi que par toute la terre la sainte Eglise confesse :
Père d’immense majesté,
vénérant ton véritable & unique Fils, & le Saint-Esprit Paraclet.
C’est toi le roi de gloire, Christ.
C’est toi le Fils éternel du Père.
C’est toi qui pour libérer & assumer l’homme, n’as pas dédaigné le sein de la Vierge.
C’est toi qui, brisant l’aiguillon de la mort, as ouvert aux croyants le Règne des cieux.
C’est toi qui trônes à la dextre de Dieu dans la gloire du Père.
Nous croyons que tu es le juge qui doit venir.
(On fléchit les genoux pour le verset suivant)
Aussi nous te prions d’assister tes serviteurs que tu as rachetés de ton précieux sang.
Comptes-nous avec tes saints dans la gloire éternelle.
Sauve ton peuple, Seigneur, & bénis ton héritage.
Et conduis-les & élève-les jusque dans l’éternité.
Chaque jour nous te bénirons, & nous louerons ton nom dans les siècles des siècles.
Daigne, Seigneur, en ce jour, nous garder sans péchés.
Aie pitié de nous, Seigneur, aie pitié de nous.
Que ta miséricorde, Seigneur, soit sur nous, selon l’espérance que nous avons mise en toi.
En toi, Seigneur, j’ai espéré, je ne serai point confondu à jamais.

Les premières mesures de cette partition :


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