Saint-Eugène, le vendredi 22 novembre 2019, grand’messe de 19h. Intégrale de la Messe des Paroisses pour les festes solennelles de François Couperin (1690) – orgue et plain-chant.
Sainte Cécile est l’une des plus illustres parmi les vierges-martyres de Rome. C’est à la fin du IIIème siècle qu’elle joignit à la couronne des vierges celle des martyrs. Mariée de force au païen Valérien, elle le convertit à la foi véritable ainsi que son beau-frère Tiburce. Les Actes de sainte Cécile nous rapportent que le jour de son mariage forcé, tandis que résonnait la musique païenne des noces, Cécile chantait en son cœur une hymne au Christ, le priant de la garder immaculée. Pour cette raison Cécile est devenue patronne des musiciens. Valérien, Tiburce et Cécile recevront tous les trois la palme du martyre, proclamant jusque dans leur mort leur fidélité au Christ Rédempteur. Cécile fut ébouillantée, puis reçut les trois coups de glaives légaux, auxquels elle survivra néanmoins trois jours encore, agonisant péniblement dans sa maison qu’elle laissa en héritage au Pape Urbain ; plus tard cette maison fut dédicacée comme église un 22 novembre, et placée sous son patronage. En octobre 1599, lorsque, sous les ordres du cardinal Sfondate, on y ouvrit le sarcophage de la sainte, son corps était encore intact. Le nom de sainte Cécile figure au Canon de la Messe romaine.
Comme nous y invite la première antienne de l’office de sainte Cécile – Cantantibus organis – notre organiste Touve R. Ratovondrahety a choisi d’honorer la sainte patronne des musiciens en jouant la plus célèbre des messes d’orgue du répertoire : la “Messe des Paroisses pour les festes solennelles” de François Couperin. Imprimée à Paris en 1690 alors que Couperin n’a que 22 ans, elle témoigne à la fois de son talent précoce et de la synthèse qu’il a su faire de l’art liturgique des maîtres parisiens de l’orgue qui l’ont précédé.
Depuis le Moyen-Age (certains prétendent depuis la Grande Peste qui avait dépeuplé les chœurs des églises), l’usage s’est introduit que l’orgue – les dimanches et jours de fêtes – alterne avec les chantres du chœur les différents versets de certaines parties de l’office et de la messe. Le jeu de l’orgue figure alors le chant liturgique.
Cet usage a été parfaitement codifié au Concile de Trente (1542-1563) et par les livres liturgiques qui en sont issus, en particulier par le Cérémonial des Evêques publié en 1600 par Clément VIII. Pour Paris, le Cérémonial parisien de 1662 sera encore plus précis sur les moments et temps où l’alternance d’orgue doit se pratiquer.
Voici quelques unes des dispositions prévues par les cérémoniaux :
- l’orgue figure toujours les versets impairs, les chantres chantent les versets pairs,
- à la messe, l’alternance se fait pour le Kyrie, Gloria, Sanctus, Agnus Dei. L’orgue figure en outre l’Offertoire et la réponse Deo gratias à l’Ite missa est, le Credo en revanche ne doit pas être alterné,
- le premier verset est régulièrement construit par l’organiste sur le plain-chant, cité en valeurs longue à la basse (cette technique reprend l’usage des polyphonies vocales traditionnellement improvisées appelées “Chant sur le livre”) – l’organiste est plus libre de composer/improviser les autres versets à sa guise (en s’inspirant plus ou moins librement du plain-chant) – le dernier verset est le plus souvent un plein jeu de l’orgue,
- un chantre dans le chœur doit proclamer à haute voix le texte du verset que l’orgue figure,
- toute alternance d’orgue est supprimée les jours de pénitence (Avent, Carême, Quatre-Temps, vigiles des fêtes) et aux offices et messes des morts : l’orgue est considéré comme l’instrument par excellence de la joie.
La Messe des Paroisses de François Couperin est conçue pour alterner avec le plain-chant de la Messe IV Cunctipotens, gardée par toutes les traditions diocésaines comme la messe par excellence des fêtes les plus solennelles. Il s’agit d’une magnifique et lente contemplation de la messe et d’une offrande musicale à Dieu qui s’unit au Saint Sacrifice.
- Introït – Loquebar (ton v.)
- Kyrie IV – Cunctipotens Genitor Deus en alternance avec la Messe des Paroisses pour les festes solennelles de François Couperin
- Gloria IV en alternance avec la Messe des Paroisses pour les festes solennelles de François Couperin
- Epître : Ecclésiastique LI, 13-17 : C’est pourquoi je veux te rendre grâces et te chanter tes louanges, Seigneur, notre Dieu.
- Graduel – Audi filia (ton vii.)
- Alleluia – Quinque prudentes virgines (ton v.)
- Evangile : Matthieu XXV, 1-13 : L’époux vint, et celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui aux noces, et la porte fut fermée.
- Credo de la Messe royale du Ier ton d’Henry du Mont, en faux-bourdon à trois parties selon la tradition de Narbonne
- Offertoire – Afferentur (ton iv.) – l’offertoire est figuré par l’orgue
- Préface des Saints au propre de l’archidiocèse de Paris
- Sanctus IV en alternance avec la Messe des Paroisses pour les festes solennelles de François Couperin
- Agnus Dei IV en alternance avec la Messe des Paroisses pour les festes solennelles de François Couperin
- Pendant la communion : Festa nunc solemnia – Motet en l’honneur de sainte Cécile – plain-chant musical (Appendix ad Graduale Romanum sive cantiones aliquot sacræ, quæ ante, sub & post Missam sæpe cantari solent – Amsterdam, 1769)
- Communion – Confundantur (ton i.) avec versets du psaume CXVIII en faux-bourdon parisien du Ier ton
- Ite missa est IV – l’orgue figure la réponse du chœur Deo gratias
- Au dernier Evangile : Salve Regina
- Procession de sortie : l’orgue reprend l’Ite missa est de la Messe des Paroisses de Couperin pendant la procession de sortie