Pour comprendre l’existence de la Basilique de Saint-Denis, nous devons revenir au saint évêque célaphore et à l’histoire de son matyre.
Envoyé par le pape saint Clément en Gaule (selon la plus ancienne Vita que nous possédons), il est le premier évêque missionnaire et évangélisateur de Paris avec ses compagnons Eleuthère, diacre et Rustique, prêtre. Il prêche aux habitants de la ville de Lutèce et obtient de nombreuses conversions. Les autorités romaines ne virent pas d’un bon œil son œuvre et l’arrêtèrent avec ses compagnons. Ils sont traduits devant le préfet Sisinnius qui les soumet à un interrogatoire et les condamne à mort. Ils seront martyrisés. La Tradition nous rapporte qu’ils le furent à Montmartre (mont des martyrs). C’est une aristocrate d’origine romaine, Catulla qui recueille le corps de Denys et procède à son ensevelissement sur les terres qu’elle possède au Nord de la ville. Le culte de Saint Denys va se développer rapidement et l’on attribue à sainte Geneviève (419 † 512) la fondation d’une nouvelle basilique sur les lieux de la sépulture de saint Denys.
La basilique Saint-Denis, telle qu’elle se présente à nous aujourd’hui est la volonté et l’œuvre de Suger (1081 – 1151) ministre des rois Louis VI le gros et Louis VII le jeune et surtout abbé de ladite abbaye à compter de 1122. Connu pour son action politique, pour s’être opposé à saint Bernard de Claivaux, notamment sur l’ornementation à apporter aux églises, il l’est aussi comme bâtisseur. Il entreprend d’agrandir l’église abbatiale dont le portail occidental est consacré le 9 juin 1140.
Pour comprendre le portail qui nous occupe aujourd’hui puisqu’il nous relate les dernières étapes de la vie de saint Denys et de ses compagnons nous devons essayer de nous l’imaginer tel que que le grand Abbé Suger l’avait conçu. Essayer, car le portail occidental a subi de nombreuses modifications : en 1771 notamment on agrandit les portes pour laisser passer les immenses dais des processions et pour se faire, on détruit les statues colonnes, la Révolution française apporte son lot de destructions habituel principalement sur les tympans et les voussures. La basilique sera aussi le théâtre d’expérimentations en matière de restauration au XIXème siècle avec notamment François Debret, prédecesseur d’Eugène Viollet Le Duc !
Le portail était achevé en 1140 au moment de sa consécration, que présente-t-il de nouveau ? L’iconographie est en grande partie renouvelée et le style donné aux sculptures se différencie des façades des abbayes normandes qui ont inspiré l’abbé Suger. La façade en rythme ternaire est un hommage à la Sainte Trinité. Des statues colonnes figurant les rois de l’Ancien Testament avaient été placées à l’entrée du sanctuaire comme pour introduire vers le Nouveau Testament de l’église. Cette réflexion sur les liens entre le l’Ancien et le Nouveau testament dans un programme iconographique sculpté dans la pierre nourrira la réflexion de ceux qui auront la charge d’élaborer les facades des cathédrales de Chartres ou Paris qui sont en cours de réalisation à l’époque.
Les tympans latéraux et du portail royal au Nord ont tous été largement remaniés voire refaits au XIXème siècle. Le portail latéral gauche a été refait par Felix Brin sculpteur, du temps de l’abbé Suger le tympan était recouvert d’une mosaïque.
Le portail royal ou portail Nord achève de nous conter l’histoire de saint Denys et de ses compagnons, et surtout les dernières étapes de leurs martyres. L’histoire se lit comme pour les vitraux du Moyen-Age : de bas en haut.
Un garde amène les trois compagnons enchainés devant le préfet Sisinnius qui doit les juger. La tête du saint nous est présentée aussi de face par le sculpteur, cette face est la seule à subsister du XIIème siècle. La femme qui se traine aux pieds du préfet est très probablement Larcia qui accusa Denys et ses compagnons d’être des magiciens, selon l’abbé Hilduin (abbé de Saint-Denis à compter de l’année 815 jusqu’à sa mort survenue entre 840 et 855).
Au centre de la scène se trouve le bourreau qui s’apprête à executer la première sentence du préfet en flagellant Denys, Eleuthère et Rustique. Denys lui tourne le dos et on peut comparer la posture de Denis à Celle du Christ devant ses bourreaux. Le regard de l’évêque est en fait tout concentré vers la récompense : la communion des mains même du Christ. Depuis leur prison les compagnons de Denys ont entre leurs mains l’un une patène et l’autre ce que l’on pourrait identifier comme une burette. Deux anges au dessus de la scène tiennent l’un un encensoir, l’autre une patène. Un calice entre le Christ et le saint est posé sur le mur de la prison qui prend ainsi une tout autre dimension en devenant un autel.
Le martyre lui même est figuré dans le haut du tympan. La décollation de saint Denys.
Le tympan est consacrée à la partie la plus tragique, le martyre lui-même. Les postures et le réalisme sont saisissants. Malgré les restaurations, les recherches ont permis de s’assurer que la composition est conforme à la conception d’origine. Saint Denys, déjà décapité, occupe le centre de la scène. Tous sont comme arrêtés dans leur geste, comme sidérés de voir le saint évêque se saisir de sa tête. De part et d’autre, les compagnons de saint Denys attendent leur tour. Aux pieds de saint Denys, un feuillage se développe, comme nourri par le sang versé par le martyr. Et enfin au sommet du tympan, la couronne du martyre est apportée par deux colombes.
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Retrouvez l’office complet de saint Denys, premier évêque de Paris, patron de notre diocèse, et de ses compagnons dans le martyre Rustique, prêtre, et Eleuthère, diacre, sur notre site, selon le propre de Paris, en plain-chant parisien (Offices notés de Paris, 1899) :
- Antiennes des premières et secondes vêpres
- Hymne des premières et secondes vêpres, du Ier ton : Lux de luce Deus – texte de Jean-Baptiste de Santeuil (1630 † 1697), sous-diacre et chanoine de Saint-Victor de Paris (Hymni sacri et novi, 1689). La musique de cette hymne est reprise de celle de Sacris solemnis, composée par saint Thomas d’Aquin pour l’office de la Fête-Dieu.
- Antienne de Magnificat des premières vêpres, du Ier ton : Salve, inclyte Martyr
- A la sainte messe : Introït du IIIème ton : Annuntiate inter gentes
- A la sainte messe : Graduel du Ier et IInd tons : Gloria vestra sumus
- A la sainte messe : Alleluia du Vème ton : Beatus vir sanctus Dionysius
- A la sainte messe : Prose du Ier ton : Gaude prole, Græcia – cette séquence a été composée par le roi de France Robert II le Pieux (c. 972 † 1031)
- A la sainte messe : Offertoire du IInd ton : Tradidimus vobis
- A la sainte messe : Communion du Ier ton : In benedictione justorum
- Antienne de Magnificat des secondes vêpres du Ier ton : Hodie Dionysius Antistes