Vous êtes chanteurs ou instrumentistes et vous souhaitez vous engager au service de la liturgie traditionnelle, n’hésitez pas à nous rejoindre !

La Schola Sainte Cécile chante dans la basilique Saint-Pierre de Rome au Vatican

Nous offrons des cours de chant gratuits chaque samedi de 16h30 à 17h30 : travail du souffle, pose de voix, vocalises, découverte du chant grégorien et du chant polyphonique.

Les Petits Chantres de Sainte Cécile - maîtrise d'enfants

Votre enfant a entre 8 et 15 ans et souhaite chanter ? Inscrivez-le aux Petits Chantres de Sainte Cécile (filles et garçons). Répétitions le mercredi à 18h30 et le dimanche à 10h30.

Retrouvez les partitions que nous éditons, classées par temps liturgique ou par compositeur. Elles sont téléchargeables gracieusement.

Photos de la solennité de saint Eugène le 20 novembre 2011 dernier

Voici quelques photos de notre fête paroissiale, au cours de laquelle la Schola Sainte Cécile a interprété la Messe Gaudete in Domino semper dite du Sacre de Louis XVI, de François Giroust.

Aux collectes de la messe.

DEVS, qui nos Martyris tui confessióne gloriósa circumdas et protegis : præsta nobis ; et ejus intercessióne gaudere, et oratióne fulciri.
Dieu qui nous entoure et nous protège par la confession glorieuse de ton martyr, le bienheureux Eugène, accorde-nous que son intercession nous réjouisse et que sa prière nous soutienne.

Traduction de l’épître par le sous-diacre.

Caríssimi : Beátus vir, qui suffert tenta-tiónem : quóniam cum probátus fúerit, accípiet corónam vitæ, quam repromísit Deus diligéntibus se.
Mes bien-aimés : Heureux l’homme qui sup-porte l’épreuve, car après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie que Dieu a promise à ceux qui l’aiment.

Au Symbole de la foi.

Et unam sanctam cathólicam et apostólicam Ecclésiam.
Je crois à l’Eglise, une, sainte, catholique et apostolique.

Au canon.

Ut tantam habéntes impósitam nubem téstium, per patiéntiam currámus ad propósitum nobis certámen, et cum eis percipiámus immarcescíbilem glóriæ corónam.
Afin que, soutenus par cette foule immense de témoins, nous courions jusqu’au bout l’épreuve qui nous est proposée et recevions avec eux l’immarcescible couronne de gloire.

Chant de l’Ite missa est par le diacre.

Suscipiéntes, Dómine, pignus æternæ vitæ, ne permittas propter amorem podibilis vitæ admittere illicita : qui Martyri tuo Eugenio dedisti propter timorem et amorem tuum duros corporis dolores libenter pati.
Ceux qui ont reçu les gages de la vie éternelle, Seigneur, ne les laisse pas commettre des actes interdits par amour d’une vie haïssable ; toi qui as accordé à Eugène, ton martyr, à cause de la crainte et de l’amour qu’il te portait, de supporter librement les souffrances du corps.

Au dernier évangile

Huc volat fidens populus salutis :
Dum colit patris cineres verendi,
Corporis morbos animique pellunt
Numine pleni.
Le peuple, dans la confiance d’obtenir la santé du corps et de l’âme, vole au tombeau d’Eugène : & tandis qu’il honore les cendres d’un père aussi respec-table, ces reliques pleines encore de la vertu du Dieu vivant, chassent leurs maladies corporelles et spirituelles.

Fichier PDF : Les 9 répons des nocturnes du Ier dimanche de l’Avent

Au cours de sa brève existence terrestre, le génial typographe allemand Holger Peter Sandhofe (7 janvier 1972 † 24 mai 2005) avait eu le temps de réaliser un travail considérable en publiant en 2002 son Nocturnale Romanum, prouesse éditoriale que nul – même Solesmes – n’avait pu conduire durant tout le XXème siècle : en effet, de 1911 (date de la réforme de l’ordonnance de l’office divin par la bulle Divino Afflatu) à 2001, aucun livre n’avait été publié qui pouvait permettre à un chœur de chanter l’office nocturne refondu par saint Pie X pour n’importe quel jour de l’année, en dehors de quelques grandes fêtes. Seul un hypothétique & complexe recours à des manuscrits ou à des rares éditions des XVIIème, XVIIIème ou XIXème siècle – lesquelles contenaient l’ordo traditionnel de l’office, substantiellement modifié en novembre 1911 – aurait pu permettre à un chœur de s’acquitter – partiellement – du chant de l’office nocturne.

Avant de mourir, Holger Peter Sandhofe avait démarré un site web prometteur sur lequel il avait commencé à mettre en ligne beaucoup de ses travaux préparatoires à d’autres futures éditions musicales, il n’y avait mis que relativement peu de ressources directement issues de son Nocturnale Romanum puisque celui-ci était déjà publié. Dieu merci, j’avais pu sauvegarder ces excellents fichiers PDF quelques temps avant d’apprendre sa disparition, rapidement suivie par la fermeture de son site web. L’un des rares fichiers issus du Nocturnale Romanum donne les 9 répons de l’office nocturne du Ier dimanche de l’Avent, répons que nous avons eu le bonheur de chanter dimanche dernier au cours des matines à Saint-Eugène, répons qui sont d’une réelle beauté. C’était émouvant de prier ces matines de l’Avent en confiant au Seigneur le repos de l’âme de Holger Peter Sandhofe.

Le premier de ces répons, Aspiciens a longe est tout particulièrement fameux et bien connu des spécialistes de la liturgie romaine, par la structure inhabituellement complexe de ses nombreuses réclames ; peut-être est-ce un relief d’un état archaïque de l’office romain dans lequel le chant des répons nocturnes tenait la première place dans la dévotion des clercs & des fidèles. Vous pouvez télécharger ce fichier PDF en cliquant sur l’image ci-dessous.

Programme du premier dimanche de l’Avent

Catéchisme de l’Avent

Saint-Eugène, le dimanche 27 novembre 2011, grand’messe de 11h.

  • Samedi 26 novembre – 20h : chant des vêpres & complies
  • Dimanche 27 novembre – 6h : chant des matines & laudes
  • Kyriale : selon les anciens usages parisiens
  • Procession d’entrée : Conditor alme siderum – hymne de l’Avent, à vêpres – texte du IXème siècle, polyphonie de Virgile Le Blanc (1592) extraite de « La Doctrine chrestienne » du R.P. Coyssard, s.j.
  • Trope de l’introït : Sanctissimus namque Gregorius – VIIIème ton – XIème-XIIème siècles
  • Kyrie XIV Iesu Redemptor – Selon l’antique tradition parisienne, on chante aujourd’hui ce Kyrie
  • Credo I
  • Pendant les encensements de l’offertoire : Mœsta Sion, prose de l’Avent de l’ancien rit de Lisieux, du 1er ton
  • Préface de l’Avent au propre de l’archidiocèse de Paris
  • Sanctus XI
  • Après la Consécration : O salutaris sur le ton de Conditor alme siderum – d’après Virgile Le Blanc (1592)
  • Agnus Dei XVII
  • Pendant la communion :
    – Alma Redemptoris Mater en plain-chant grégorien
    – Salus æterna, séquence du premier dimanche de l’Avent (XIème siècle) des anciens missels parisiens
    – Rorate cœli, plain-chant de l’Oratoire de France – 1615 – harmonisations du refrain : traditions de Langres et d’Avignon – chant des versets : tradition de Rouen

  • Prière pour la France, faux-bourdon du 1er ton à l’usage de l’Eglise de Paris (édition de 1739)
  • Ite missa est XIV
  • Au dernier Evangile : Alma Redemptoris Mater
  • Procession de sortie : Venez, divin Messie – texte (1701) de l’abbé Simon-Joseph Pellegrin (1663 + 1745), sur le vieux noël « Laissez paistre vos bestes » ; harmonisation de M. l’abbé Lambert (Versailles, 1845)
  • Télécharger le livret de cette messe au format PDF.
    Télécharger le livret de l’office au format PDF.

    Programme du XXIVème dimanche après la Pentecôte – Saint Philippe – ton 7

    Paroisse catholique russe de la Très-Sainte Trinité, le dimanche 27 novembre 2011 du calendrier grégorien – 14 novembre 2011 du calendrier julien, tierce & sexte à 8h55, divine liturgie de saint Jean Chrysostome à 9h15. La divine liturgie sera suivie d’une pannychide pour Mgr Dupire & tous les anciens curés & prêtres de notre paroisse.

    Dimanche du ton VII de l’Octoèque. Nous fêtons aussi en ce jour l’apôtre saint Philippe. Originaire de Bethsaïde, sur la rive nord du lac de Tibériade, en Galilée, comme André et son frère Pierre. Jean le Baptiste, qui se tenait à Béthanie au delà du Jourdain avec deux de ses disciples, leur dit en voyant Jésus: “Voici l’agneau de Dieu.” Les deux disciples suivirent Jésus, l’un d’eux était André, le second sans doute Philippe. Jésus leur dit “Viens, suis-moi.” Tout de suite Philippe évangélise Nathanaël : “Nous avons trouvé le Messie… viens et vois” (Jean 1, 45-46) On retrouve Philippe au moment de la multiplication des pains : “Jésus dit à Philippe : Où achèterons-nous des pains pour que tous ces gens puissent manger ?” (Jean 6, 5) Peu avant la Passion, des Grecs qui veulent voir Jésus, s’adressent à lui: “Nous voulons voir Jésus” (Jean 12, 20). Au soir de la dernière Cène, Philippe lui, veut voir Dieu: “Montre-nous le Père et cela nous suffit. – Philippe qui me voit, voit le Père” (Jean 14, 8). Philippe est donc en quelque sorte le disciple qui veut voir et fait voir ! Après la Pentecôte, il partit évangéliser des régions d’Asie Mineure et a été martyrisé par les Romains à Hiérapolis, en Phrygie, où une équipe archéologique a cette année retrouvé sa tombe en fouillant les ruines d’une église. Ses reliques avaient été transférées en la basilique des Douze Apôtres à Rome, avec celle de saint Jacques, un 1er mai, qui est la date traditionnelle de sa fête en Occident.

    A la petite entrée :
    1. Tropaire du dimanche, ton 7 : Par ta Croix, Seigneur, tu as détruit la mort, * tu as ouvert au Larron le Paradis ; * tu as changé en joie le deuil des saintes Femmes * et tu as donné l’ordre à tes Apôtres de proclamer que tu es ressuscité, Christ Dieu, * pour donner au monde la grâce du salut.
    2. Tropaire de saint Philippe, ton 3 : Apôtre saint Philippe, * intercède auprès du Dieu de miséricorde * pour qu’à nos âmes il accorde le pardon de nos péchés.
    3. Gloire au Père, & au Fils, & au Saint-Esprit.
    4. Kondakion de l’Apôtre, ton 8 : Ton disciple et ami, qui imita ta passion, * a proclamé au monde entier que Tu es Dieu, lui le prédicateur de Dieu Philippe ; * par ses prières préserve des ennemis ** ton Église et toute ta ville, par l’intercession de la Mère de Dieu, ô Très- miséricordieux.
    5. Et maintenant, & toujours, & dans les siècles des siècles. Amen.
    6. Kondakion du dimanche, ton 7 : Désormais la force de la mort est impuissante à retenir les mortels, * car le Christ est descendu, brisant et détruisant les puissances de la mort ; * l’Enfer est enchaîné, * les Prophètes tous ensemble se réjouissent. * Le Sauveur, disent-ils, est apparu à ceux qui demeurent dans la foi ; * venez, fidèles, prendre part à la Résurrection.
    Prokimen
    Du dimanche, ton 7 :
    ℟. Le Seigneur donne la puissance à son peuple, le Seigneur bénit son peuple dans la paix (Psaume 28, 11).
    ℣. Rendez au Seigneur, fils de Dieu, rendez au Seigneur la puissance & la gloire (Psaume 28, 1).
    De saint Philippe, ton 8 :
    ℟. Par toute la terre a retenti leur message, & leur parole jusqu’aux limites du monde. (Psaume 18, 5)
    Alleluia
    Du dimanche, ton 7 :
    ℣. Il est bon de rendre grâce au Seigneur, de chanter pour ton Nom, ô Très-Haut, (Psaume 91, 1)
    ℣. de publier au matin ton amour, ta fidélité au long des nuits (Psaume 91, 2).
    De saint Philippe :
    ℣. Les cieux racontent tes merveilles, Seigneur, et ta vérité dans l’assemblée des saints.
    Verset de communion
    Du dimanche : Louez le Seigneur du haut des cieux, louez-le au plus haut des cieux. (Psaume 148, 1).
    De saint Philippe : Par toute la terre a retenti leur message, & leur parole jusqu’aux limites du monde (Psaume 18, 5). Alleluia, alleluia, alleluia.

    Homélie pour la fête de sainte Cécile 2011

    Notre triduum paroissial – saint Eugène avant-hier, la Présentation hier à Notre-Dame des Victoires et sainte Cécile ce soir – a été marqué cette fois encore par plusieurs rendez-vous musicaux. C’est que liturgie et musique entretiennent un lien étroit et je suis heureux d’avoir pu réunir tous les écrits que Benoît XVI a publié sur ce thème dans un petit ouvrage qui vient de paraître, intitulé L’esprit de la musique, préfacé par notre cher Maître de chœur et que plusieurs d’entre vous ont déjà pu se procurer. Ouvrage qui pourra être utile, je l’espère, à tous ceux qui voudront œuvrer à la restauration d’une véritable liturgie, qui ne soit pas fabriquée mais reçue. C’est donc Benoît XVI que je prendrai pour guide ce soir. Dans son discours des Bernardins, à Paris, il y a trois ans, il disait ceci : « De cette exigence capitale de parler avec Dieu et de le chanter avec les mots qu’il a lui-même donnés, est née la grande musique occidentale. Ce n’était pas là l’œuvre d’une créativité personnelle, où l’individu, prenant comme critère essentiel la représentation de son propre moi, s’érige un monument à lui-même. Il s’agissait plutôt de reconnaître attentivement, avec les oreilles du cœur les lois constitutives de l’harmonie musicale de la création, les formes essentielles de la musique émise par le Créateur dans le monde et en l’homme, et d’inventer une musique digne de Dieu qui soit en même temps authentiquement digne de l’homme et qui proclame hautement cette dignité ».

    C’est clair : pour Ratzinger, la musique est civilisatrice et cette musique dérive de la liturgie. Pourquoi dérive-t-elle de la liturgie et pourquoi la liturgie a-t-elle eu recours, dès l’Ancien Testament, à la musique ? Saint Augustin répond en un mot que notre sainte Cécile, amante du Christ, ne peut que confirmer : Cantare amantis est, « chanter est le fait de celui qui aime ». La liturgie étant une participation au dialogue trinitaire du Père et du Fils, elle ne peut donc qu’aspirer au chant. Les Pères de l’Église le justifieraient par le fait que le chant sacré a une origine christologique. « Quand l’Église primitive a fait siens les psaumes dans sa prière, elle les chante comme hymnes du Christ. Le Christ lui-même devient ainsi le chef de chœur qui nous apprend le chant nouveau, qui donne à l’Eglise le ton et la manière dont elle pourra louer adéquatement Dieu et s’unir à la liturgie céleste »[1]. Le chant liturgique nous rappelle ainsi que nos rites s’enracinent dans la parole de Dieu, dans la Révélation divine, dont ils véhiculent quelque chose de l’inspiration. Il nous rappelle aussi que nous sommes ici-bas des étrangers et des voyageurs, à la recherche d’une patrie meilleure, celle du ciel, la Jérusalem céleste, où des myriades d’anges chantent les noces éternelles de l’Epoux et de l’Epouse, du Christ et de l’Église. Cet enracinement de la liturgie dans l’Ecriture impose à la musique sacrée, au chant et aux instruments, d’évidentes contraintes : « Chanter avec sagesse, psallite sapienter, renvoie à un art où compte la parole, mais cette parole ne doit pas être comprise en un sens rationaliste superficiel et étroit où chaque mot serait à tout instant compréhensible. Il s’agit bien plutôt de ce que nous pouvons appeler, en nous référant à l’Église ancienne, une musique ‘conforme au Logos’ : le Dieu qui est Parole créatrice et porteuse de sens, dès les origines et jusque dans chaque vie, appelle un art qui se tienne sous le primat du Logos, qui intègre donc toute la diversité de l’être humain, à partir de ses forces vives morales et psychologiques les plus hautes, mais qui, de la sorte, arrache aussi l’esprit à son rationalisme et à son volontarisme étroit pour qu’il prenne place dans la symphonie de la Création »[2]. Autrement dit, en chantant dans la liturgie, l’homme découvre sa vocation première, celle qu’il tient de son être de créature, ou plus exactement, pour parler comme S. Thomas d’Aquin, de cette créature qui se situe à l’horizon du monde des sens et du monde de l’esprit. Cette créature rationnelle qui est appelée à ressaisir la louange muette de la Création dans un geste et une parole émerveillés, qui de soi appellent le chant et la musique des instruments, pour intégrer symboliquement le monde de la matière, geste et parole qui se dilatent à la mesure même de cette Création qui s’exprime par lui. En effet, “dans la rencontre de l’homme avec Dieu, la parole ne suffit plus : une part de lui-même s’éveille et se met à chanter. Il y associe la Création car son monde lui paraît trop étroit”[3].

    C’est la doctrine de saint Augustin, dans son homélie sur le psaume 32, choisie par le nouveau bréviaire pour illustrer la fête de sainte Cécile : « Eh bien, le Seigneur lui-même te donne cette méthode de chant : ne cherche pas des paroles, comme si tu pouvais expliquer ce qui plaît à Dieu. Chante par des cris de jubilation. Bien chanter pour Dieu, c’est chanter par des cris de jubilation. En quoi cela consiste-t-il ? C’est comprendre qu’on ne peut pas expliquer par des paroles ce que l’on chante dans son cœur. En effet, ceux qui chantent, en faisant la moisson, ou les vendanges, ou n’importe quel travail enthousiasmant, lorsqu’ils se mettent à exulter de joie par les paroles de leurs chants, sont comme gonflés d’une telle joie qu’ils ne peuvent pas la détailler par des paroles, ils renoncent à articuler des mots, ils éclatent en cris de jubilation. Ce cri est un son manifestant que le cœur enfante des sentiments qu’il ne peut exprimer ». Ce mouvement d’action de grâce, qui s’exprime pour nous dans la liturgie, répond à l’incarnation du Verbe : « Quand la Parole, le Verbe, se fait musique, il y a bien passage aux sens, incarnation, annexion de forces en deçà et au-delà du rationnel, captage de l’harmonie cachée de la Création, révélation du chant qui sommeille au fond des choses. Mais alors, cette transformation en musique est aussi elle-même le tournant du mouvement : elle n’est pas seulement incarnation du Verbe, mais aussi spiritualisation de la chair, de la matière. Le bois et le cuivre deviennent son, l’inconscient et l’insoluble se muent en harmonie emplie d’ordre et de sens (…). L’incarnation au sens chrétien est toujours en même temps spiritualisation, et la spiritualisation chrétienne est incarnation dans le corps du Logos qui s’est fait homme »[4].

    Une musique sacrée ainsi conçue, lestée d’une dimension ontologique et d’une dimension théologale, ne peut se satisfaire de la médiocrité que voudrait lui imposer une pastorale utilitariste qui ne voit dans la musique qu’une manière d’animer les assemblées liturgiques. « Participation active », dans ce contexte, signifierait que tous doivent chanter toutes les parties de la liturgie, ce qui conduit bien évidemment à un effrayant nivellement par le bas dont celui qui vous parle ce soir est le premier à être conscient, pour ne pas dire qu’il en est aussi bien souvent l’acteur à son corps défendant ! Une telle conception de la musique liturgique signifie bien entendu la liquidation de toute formation d’élite, des schola en particulier. Joseph Ratzinger, dont le frère Georg a longtemps dirigé les Domspatzen de Regensburg, s’élève bien sûr contre cet abus lorsqu’il écrit : « Il est de fait que beaucoup de gens sont davantage capables de chanter avec le cœur qu’avec leur bouche, et leur cœur chante véritablement lorsqu’ils entendent le chant de ceux à qui il a été donné de chanter aussi avec la bouche. Si bien qu’en ces derniers, ils chantent en quelque sorte eux-mêmes, et ainsi écoute reconnaissante et chant des chanteurs deviennent ensemble une unique louange de Dieu »[5]. Merci, Très Saint Père, pour ceux qui chantent mal ! La dilatation de la louange chrétienne par l’intégration de la musique suppose un discernement des esprits. Toute musique n’est pas propre à figurer dans la liturgie. Car la musique, souligne Ratzinger, traduit une anthropologie sous-jacente. « Il y a la musique d’agitation politique, qui met l’homme en mouvement pour tel ou tel objectif collectif ; il y a la musique sensuelle, qui introduit l’homme à l’érotisme ou débouche d’une autre manière sur des sentiments de nature sensuelle ; il y a la simple musique de variétés, qui n’a rien à dire de particulier, mais veut simplement briser le poids du silence ; il y a la musique rationalisante où les sons ne servent qu’à des échafaudages intellectuels, mais qui ne parvient pas à pénétrer vraiment l’esprit et les sens. On pourrait y ranger bien des chants catéchétiques desséchés, bien des chants modernes fabriqués par des commissions liturgiques »[6].

    Ratzinger réserve cependant ses critiques les plus vives à la musique néopaïenne qui, loin de toute référence au Logos, au psallite sapienter, déchaîne les forces dionysiaques latentes en l’homme marqué par le péché. D’un côté, dit-il, « il y a la musique commerciale, destinée au peuple, mais qui n’a plus rien de populaire au sens traditionnel du terme. Produite industriellement, elle appartient aux phénomènes de masse et n’est rien d’autre, finalement, qu’un culte de la banalité. D’autre part, la musique rock et ses dérivés, en particulier la techno, qui sont les vecteurs de passions élémentaires et qui, dans les grands festivals, développent un caractère cultuel, jouant même le rôle d’un anticulte par rapport au culte chrétien. Pris dans le mouvement de la foule, soumis à l’ébranlement du rythme, du bruit et des effets de lumière, les participants se sentent pour ainsi dire libérés d’eux-mêmes. Dans l’extase provoquée par l’annihilation de toute barrière et la chute de toute inhibition, ils déchaînent en quelque sorte les forces élémentaires de l’univers, dans lesquelles ils finissent par se faire engloutir”[7]. “Il s’agit de pratiques de délivrance, apparentées dans leur forme à la délivrance par la drogue et fondamentalement opposées à la foi dans le salut chrétien. Il est donc parfaitement logique que dans ce domaine se diffusent aujourd’hui des cultes et des musiques sataniques de plus en plus nombreux, dont on n’a pas encore assez pris au sérieux la dangereuse puissance de dislocation et de dissolution délibérées de la personne. Le combat livré par Platon entre musique apollinienne et musique dionysiaque n’est pas notre combat car Apollon n’est pas le Christ. Mais la question qu’il a posée nous concerne d’une manière toute particulière”[8]. Et il conclut : “Ce n’est pas pour des raisons esthétiques, ni par esprit borné de restauration, ni par immobilisme historique, mais c’est pour des raisons de fond qu’une musique de ce genre doit être exclue de l’Eglise”[9] et, pourrait-on ajouter, de l’univers propre du chrétien.

    En conclusion, la musique n’est pas neutre, et pourtant elle est nécessaire à la vie chrétienne. « L’esprit n’est point avili lorsqu’il assume les sens, mais c’est toute la richesse de la Création qui est reconduite à lui. Et les sens ne sont pas privés de leur réalité lorsqu’ils sont pénétrés par l’esprit, mais c’est ainsi seulement qu’il leur sera donné d’avoir part à l’infini »[10]. Pour finir, je citerai le commentaire que donne Ratzinger d’un apologue de Gandhi : « Dans la mer vivent les poissons, et ils sont muets ; les animaux sur la terre crient ; mais les oiseaux, dans le ciel, chantent. A la mer appartient en propre le silence, à la terre le cri et au ciel le chant. Mais l’homme est participant des trois. Il porte en lui la profondeur de la mer, la pesanteur de la terre et la hauteur du ciel. Et c’est pourquoi leurs trois caractéristiques sont aussi les siennes : le silence, le cri et le chant. Je voudrais ajouter ceci : nous voyons aujourd’hui un homme sans transcendance auquel ne reste que le cri, parce qu’il ne veut plus être que terrestre et tente même de changer le ciel et la mer profonde pour en faire sa terre. La vraie liturgie, celle de la communion des saints, le restitue tout entier à lui-même. Elle lui enseigne de nouveau le silence et le chant en lui ouvrant les profondeurs de la mer et, en lui apprenant à voler, lui donne accès à l’être des anges ; en élevant le cœur de l’homme, elle fait à nouveau résonner en lui le chant enseveli. Et nous pouvons même dire : la vraie liturgie se reconnaît au fait qu’elle nous libère de l’activisme universel et nous restitue la profondeur et la hauteur, le silence et le chant. La vraie liturgie se reconnaît au fait qu’elle est cosmique et non réduite au groupe. Elle chante avec les anges. Elle se tait comme se tait l’attente des profondeurs de l’univers. Et c’est ainsi qu’elle délivre la terre ! »[11].

    Et c’est sur ces paroles que je vais, moi aussi, enfin me taire !

    ***********************

    Notes :    (↵ reviens au texte)

    1. L’esprit de la liturgie, Ad solem, 2001, p. 135.
    2. Un chant nouveau pour le Seigneur, Desclée, 1995, p. 141.
    3. L’esprit de la liturgie, Ad solem, 2001, p. 111.
    4. Croire et célébrer, Parole et Silence, 2008, p. 103.
    5. La célébration de la foi, Téqui, 1985, p. 118.
    6. Croire et célébrer, Parole et Silence, 2008, p. 105.
    7. L’esprit de la liturgie, Ad solem, 2001, pp. 119-120.
    8. Croire et célébrer, Parole et Silence, 2008, pp. 104-105.
    9. Croire et célébrer, Parole et Silence, 2008, p. 105.
    10. Croire et célébrer, Parole et Silence, 2008, p. 106.
    11. Croire et célébrer, Parole et Silence, 2008, pp. 108-109.

    Tubas cum cytharis – rythme en l’honneur de sainte Cécile

    Cette pièce témoigne de la dévotion des musiciens envers sainte Cécile au XVème siècle. Elle peut se chanter en rythme ternaire, en prenant pour longues les notes avec épisèmes verticaux.

    1. Tubas cum cytharis jam nunc assumite. Prenez maintenant vos trompettes et vos cithares,
    2. Triumphum Mártyris jam nunc celebráte. Venez maintenant célébrer le triomphe des martyrs.
    3. Angelórum et Vírginum ágmina. Et, troupe des anges et des vierges,
    4. Et cum voce lætítiæ dícite : Dites tous avec joie comme nous :
    O felix Cæcília ! O felix Cæcília ! O heureuse Cécile !
    5. Præclára sítiens illa victóriæ. Elle aspire à la victoire éclatante,
    6. In corpus sæviens virtúte grátiæ. En son corps souffrant brille la force de la grâce,
    7. Tradit furéntibus. Elle le livre aux furieux,
    8. Membra mucrónibus. Elle livre ses membres aux malfaiteurs.
    O felix Cæcília ! O felix Cæcília ! O heureuse Cécile !
    9. Et nos qui gémimus favens nos respíce. Et nous qui gémissons, regarde-nous favorablement
    10. Sæpe quem læsimus sta coram Júdice. Assiste-nous devant le Juge que souvent nous avons lésé,
    11. Líberis det méntibus ad cælum téndere. Aide nos âmes à tendre, libres, vers le ciel,
    12. Purgatósque sórdibus fac tecum vívere. Pour que purgés de nos péchés nous puissions vivre en ta compagnie.
    O felix Cæcília ! O felix Cæcília ! O heureuse Cécile !

    Source : Chanoine Joseph Besnier, Directeur de la Maîtrise de la Cathédrale de Nantes, Manuel pour les bénédictions du S. Sacrement et les processions, Saint-Laurent-sur-Sèvres, Lemoine-Biton, 1939, p. 358.

    Quam pulchre graditur, la “Marseillaise de Saint-Sulpice”

    En cette belle fête de la Présentation de la Vierge au Temple, nous vous proposons la musique et le texte d’une hymne de cette fête, composition naguère très célèbre.

    Quam pulchre graditur fut composée dans la première moitié du XVIIIème siècle par Urbain Robinet, docteur en théologie, qui avait été élève à Saint-Sulpice vers 1706. Cette hymne fut accueillie par la suite par plusieurs bréviaires diocésains français pour les vêpres de la Présentation, cet office étant dépourvu d’hymne propre au Bréviaire romain. Elle constitue du reste toujours l’hymne des vêpres de la Présentation dans le propre de Paris (sa musique ci-après est tirée des Offices propres du diocèse de Paris approuvés par Sa Sainteté le Pape Pie XI et publiés par ordre de Son Eminence le Cardinal Dubois, archevêque de Paris en 1923). L’hymne est surtout célèbre pour avoir servi à la touchante cérémonie de renouvellement des promesses cléricales le 21 novembre en la fête de la Présentation, cérémonie instituée par les Sulpiciens et diffusée par la suite dans de nombreux séminaires. Elle était chantée avec ferveur et entrain par les membres du clergé, d’où son sobriquet de “Marseillaise de Saint-Sulpice” ou de “Marseillaise de la Sainte Vierge”.

    La musique en est évidemment ternaire (il faut penser les épisèmes verticaux de la notation de 1923 comme des notes longues).

    Télécharger la partition sous forme de livret.

    Quam pulchre graditur filia principis,
    Templi cum properat limina tangere !
    Praeludit meliori
    Quam mox offeret hostiam.
    Qu’elle est belle la démarche de la fille du prince, se hâtant de toucher au parvis du Seigneur ! Elle prélude, en s’immolant elle-même, au sacrifice plus précieux qu’elle offrira bientôt.
    E matris gremio, Numinis in sinum
    Infans non dubiis passibus advolat;
    Virgo Numinis ara,
    Aris victima sistitur.
    Encore enfant, elle accourt, non d’un pas incertain, des bras de sa Mère dans le sein de Dieu ; et cette Vierge, dont le cœur est un autel consacré à la Divinité, se présente devant les autels comme victime.
    Sponso membra Deo mollia devovet;
    Cordis Virginei dedicat intima
    Verbo debita Mater,
    Verbo viscera consecrat.
    En prenant Dieu pour son Époux, elle lui voue son tendre corps ; elle lui dédie l’intérieur de son cœur virginal, et consacre déjà son propre sein au Verbe, dont elle doit être la Mère.
    Tecum cuncta Deo prodiga dum voves,
    Numen, Virgo fui pectoris incola,
    Quanto foenore pensat
    Terras qua bona despicis !
    O Vierge qui vouez à Dieu toutes choses avec vous, de quel accroissement de grâces le Dieu qui habite dans votre cœur ne paye-t-il pas les biens que vous lui sacrifiez ?
    Quid nos illa queant improba gaudia?
    Cur nos jam pigeat vincula rumpere?
    Dux est Virgo sacerdos :
    Fas sit quo properat sequi !
    Pourquoi de misérables joies nous retiennent-elles ? Pourquoi différer encore de rompre tous nos liens ? Vierge et prêtre, elle nous ouvre la voie : qu’il nous soit donné de marcher à sa suite !
    Ergo nunc tua gens se tibi consecrat;
    Ergo nostra manes portio tu Deus,
    Qui de Virgine natus,
    Per nos sape renasceris.
    C’en est donc fait, ô Dieu, votre tribu se consacre à vous seul ; donc vous demeurez notre unique partage, vous qui, né de la Vierge, daignez chaque jour renaître à notre voix.
    Sit laus summa Patri, summaque Filio;
    Sit par, sancte, tibi gloria, Spiritus !
    Si nos intus aduris,
    Puro corde litabimur. Amen.
    Gloire suprême au Père, gloire suprême au Fils, égale gloire à vous, Esprit-Saint ! si vous nous enflammez intérieurement, nous offrirons d’un cœur pur le divin sacrifice.

    Vêpres & salut solennels de saint Eugène

    Un saint évêque, par Véronèse

    Saint-Eugène, le dimanche 20 novembre 2011, vêpres de 17h.

  • Dixit Dominus (H. 197) de Marc-Antoine Charpentier (1643 † 1704), maître de chapelle de Mademoiselle de Guise, du Dauphin, des Jésuites et de la Sainte Chapelle
  • Virgines, & vos pueri vicissim – hymne des Ires et IIes vêpres de l’ancien office parisien de saint Eugène – plain-chant du sixième ton tiré des livres de Coutances
  • Magnificat du Ier ton de Claudin de Sermisy (1490 – 1562), maître de la chapelle royale
  • Salut du Très-Saint Sacrement

  • Motet d’exposition : O salutaris hostia – Michel Imbert, maître de musique de l’Eglise de Sens (Méthode de serpent de 1780)
  • Motet à la Bienheureuse Vierge Marie : Salve Regina
  • Motet à Saint-Eugène : Sancti Eugenii digna memoria – hymne de l’ancien office parisien de saint Eugène – plain-chant du premier ton (H. 55) de Marc-Antoine Charpentier (1643 † 1704), maître de chapelle des Jésuites
  • Prière pour le Pape : Tu es Petrus
  • Prière pour Mgr l’Archevêque
  • Prière pour la paix : Da pacem, Domine
  • Tantum ergo – Orfeo Vecchi (c. 1550 † 1604), maître de chapelle de Santa Maria della Scala à Milan
  • Bénédiction du Très-Saint Sacrement
  • Louanges divines en réparation des blasphèmes
  • Motet d’action de grâces : Adoremus in æternum – plain-chant musical
  • Télécharger le livret des vêpres au format PDF.

    Programme de la solennité de saint Eugène, premier évêque de Tolède & martyr, patron

    Saint-Eugène, le dimanche 20 novembre 2011, grand’messe de 11h.

    Pour fêter notre saint patron, la Schola interprétera cette année la Messe GAVDETE IN DOMINO SEMPER, dite du Sacre de Louis XVI écrite par son maître de chapelle François Giroust (1737 † 1799), messe qui fut interprétée en la cathédrale de Reims le dimanche de la Trinité, 11 juin 1775, pour le dernier sacre d’Ancien Régime.

  • Mémoire du XXIIIème & dernier dimanche après la Pentecôte – Propre du jour en vieux plain-chant parisien
  • Procession des reliques de saint Eugène : Christus vincit – Laudes regiæ (acclamations carolingiennes – IXème siècle)
  • Retour au chœur : Quam dilecta – Psaume 84 – grand motet de Michel Richard de Lalande (1657 † 1726), maître de la chapelle des rois Louis XIV et Louis XV (premier verset)
  • Introït
  • Kyrie & Gloria de la Messe Gaudete in Domino semper, du sacre de Louis XVI, par François Giroust
  • Graduel
  • Alleluia
  • Séquence : Verbi semen qui plantavitprose de saint Eugène – selon la tradition, l’orgue chante les strophes impaires.
  • Credo de la Messe Gaudete in Domino semper, du sacre de Louis XVI, par François Giroust
  • Offertoire
  • Pendant les encensements de l’offertoire : suite du Quam dilecta de Michel-Richard de Lalande
  • Préface des Saints au propre de l’archidiocèse de Paris
  • Sanctus de la Messe Gaudete in Domino semper, du sacre de Louis XVI, par François Giroust
  • Après la Consécration : O salutaris hostia – François Giroust (composé pour la cathédrale d’Orléans)
  • Agnus Dei de la Messe Gaudete in Domino semper, du sacre de Louis XVI, par François Giroust
  • Pendant la communion : suite & fin du Quam dilecta de Michel-Richard de Lalande
  • Communion
  • Prière pour la France, de la Messe Gaudete in Domino semper, du sacre de Louis XVI, par François Giroust
  • Ite missa est de la Messe VIII – De Angelis
  • Au dernier Evangile : Salve Regina
  • Procession de sortie : Virgines, & vos pueri vicissim – hymne des Ires et IIes vêpres de l’ancien office parisien de saint Eugène – plain-chant du sixième ton tiré des livres de Coutances
  • Schola & ensemble instrumental Sainte Cécile
    Anne Foulard, Clotilde de Nedde & Fanny Bornot, dessus
    Suzy Glespen & Marie-Aude Labatide-Alanore, bas dessus
    Hilaire Vallier, taille
    Constant Balaÿ & Nicolas Vardon, basses
    Hilaire Vallier & Eric Bourgeot, flûtes
    Muriel Raynaud et Marie-Pascale Vironneau
    Ariane Hautdidier, alto
    Isabelle Raffray & Marie-Ange Wachter, violoncelles
    John Chappuis, luth
    Direction : Henri de Villiers
    à l’orgue, Touve R. Ratovondrahety

    Télécharger le livret de cette messe au format PDF.
    Histoire de saint Eugène et de ses reliques