Nous offrons des cours de chant gratuits chaque samedi de 16h30 à 17h30 : travail du souffle, pose de voix, vocalises, découverte du chant grégorien et du chant polyphonique.
Votre enfant a entre 8 et 15 ans et souhaite chanter ? Inscrivez-le aux Petits Chantres de Sainte Cécile (filles et garçons). Répétitions le mercredi à 18h30 et le dimanche à 10h30.
De Jerusalem * exéunt relíquiæ et salvátio de monte Sion ; proptérea protéctio erit huic civitáti, et salvábitur propter David fámulum ejus. Alleluia.
De Jérusalem sortent les reliques, et le salut de la montagne de Sion ; aussi cette cité sera-t-elle protégée et sauvée à cause de David, son serviteur. Alléluia.
Cette antienne De Jerusalem exeunt fait partie d’une vaste série d’antiennes processionnelles qui étaient chantées à Rome lors de la procession des Litanies Majeures, lesquelles se tiennent le 25 avril. N’ayant pas été consignées dans le Missale Romanum de saint Pie V, elles sont de fait tombées en désuétudes, en dépit de leur grande antiquité. L’usage de Paris en a conservé un certain nombre et commençait la procession des Litanies Majeures par celle-ci, De Jerusalem exeunt. Ces antiennes étaient transcrites à la fois dans le Missel et dans le Processional, elles étaient utilisées non seulement pour les Litanies Majeures, célébrées le 25 avril concomitamment à la fête de saint Marc, mais également aux Litanies Mineures, c’est-à-dire aux trois jours de Rogations qui précèdent la fête de l’Ascension. Leur chant précédait à l’origine celui des sept psaumes de la pénitence et celui des litanies des saints.
Ces antiennes étaient appelées au Moyen-Age antiennes litaniales – antiphonæ lætanialis ou encore antiennes de la miséricorde – antiphonæ de Misericordia. Elles remontent très vraisemblablement à l’époque de saint Grégoire le Grand (VIème siècle) voire plus haut. A l’origine, et avant de voir leur emploi se spécialiser dans les manuscrits médiévaux pour les Litanies Majeures et Mineures, elles étaient employées à Rome pour toutes les processions, à commencer par celles qui avaient lieu tous les jours de station entre l’église de la collecte et celle de la station.
Le texte de notre antienne De Jerusalem exeunt rappelle que les reliques des saints se doivent porter aux processions des Litanies Majeures et Mineures (les Rogations), ainsi qu’on le voit sur toutes les représentations graphiques de ces cérémonies.
Voici le manuscrit parisien – le Missale Parisiense cité plus haut – sur lequel nous avons établi notre édition :
A titre de comparaison, voici la même antienne De Jerusalem exeunt dans le Processional parisien imprimé de 1556 publié par Mgr Jean du Bellay, 108ème évêque de Paris (f°32 v° et f°33 r°) :
Ave, * Rex noster, Fili David, Redémptor mundi, quem prophétæ prædixérunt Salvatórem dómui Israel esse ventúrum. Te enim ad salutárem víctimam Pater misit in mundum, quem exspectábant omnes sancti ab orígine mundi. Et nunc : “Hosanna Fílio David : Benedíctus qui venit in nómine Dómini : Hosánna in excélsis”.
Salut, notre Roi, Fils de David, Rédempteur du monde, que les prophètes prédirent être le Sauveur de la maison d’Israël qui doit venir. C’est toi en effet que le Père envoya dans le monde comme victime salutaire, qu’attendaient tous les saints depuis l’origine du monde. Et maintenant : “Hosanna au Fils de David ; béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, Hosanna dans les hauteurs.”
L’antienne Ave Rex noster, qui n’a pas été retenue parmi les pièces chantées à la procession des Rameaux par le Missel de Saint Pie V de 1570, n’est pas propre à Paris : elle se rencontre au cours de la cérémonie du dimanche des Rameaux dans de très nombreux usages diocésains ou d’ordres religieux (on la retrouve ainsi chez les Cisterciens, les Carmes et les Dominicains – à Tolède, le chantre qui l’entonnait portait un sceptre en honneur de la royauté du Christ[1]).
Au rit parisien, après le chant de l’évangile des Rameaux (ou après le sermon qui le suit, s’il y a lieu), on chante cette antienne Ave Rex noster. Ce chant au cours des âges à donné lieu à une cérémonie touchante, accompagnant la salutation du Messie comme notre roi.
Pendant ce chant en effet, le célébrant, ses ministres, et le reste du clergé selon son rang, puis le peuple, tous viennent adorer deux à deux la croix. Celle-ci est soit la croix hosannière, édifiée pour cette cérémonie le plus souvent dans le cimetière, soit la croix de procession (ou même parfois à la croix de la poutre de gloire à l’entrée du chœur de certaines églises).
Cette adoration se déroule de la façon suivante : on s’incline profondément devant la croix, puis on se met à genoux pour l’embrasser, en jetant à son pied une petite branche de son rameau, à l’imitation du peuple de Jérusalem jetant des Rameaux sous les pas du Sauveur entrant dans la Ville. On se retire en s’inclinant à nouveau une seconde fois. Certaines Semaines Saintes notent qu’on répète l’antienne Ave Rex noster autant de fois que nécessaire pendant toute cette adoration[2].
Cette cérémonie est décrite dans le Cérémonial parisien du Cardinal de Noailles de 1703, Chapitre VII, 9 (De Dominica Palmarum :
Post concionem, vel ubi non habetur, post evangelium, cantatur antiphona Ave Rex noster, tuncque celebrans, ministri, ac reliqui de clero per ordinem, & populus, prostrati crucem osculantur, & ad ejus pedem projiciunt surculum rami, profunde inclinantes ante & post.
Au Moyen-Age, dans les endroits où l’on avait coutume de porter une hostie consacrée à la procession des Rameaux[3], c’était le corps du Christ qui était adoré au moment de l’antienne Ave Rex noster, au lieu de la croix.
Au travers de ce petit exemple aujourd’hui oublié de cette antienne des Rameaux, on admirera le génie des liturgies médiévales qui associaient habilement le chant des textes liturgiques à des gestes profonds, apte à marquer soutenir la foi des peuples.
Ce répons, le troisième du troisième nocturne de la fête de la Nativité de saint Jean Baptiste dans l’ancien rit parisien, était également repris au cours de la procession qui précédait à Paris la grand-messe de cette fête (en seconde position, après le répons Hic præcursor). Présent dans de très nombreux manuscrits médiévaux un peu partout en Europe, ce répons ne figure plus dans l’office romain actuel, qui a éliminé les dernier répons de matines par simplification de cette partie de l’office, en posant que le Te Deum en tenait lieu (la disposition primitive était : chant du dernier répons – chant de l’évangile de matines – chant du Te Deum ; or l’évangile de matines, attesté par Egérie au IVème siècle, a fini par disparaître en Occident, mais il s’est conservé à l’office dominical bénédictin ainsi qu’aux matines de Noël et de l’Epiphanie dans la plupart des usages diocésains ou religieux).
Cette miniature représentant la procession de la Fête-Dieu est tirée d’un Missel à l’usage de la paroisse parisienne de Saint-Germain-L’Auxerrois, daté des années 1480-1490, commandé par Pierre de Cerisay, doyen de Saint-Germain-l’Auxerrois de 1474 à 1507, et conservé à la Bibliothèque Mazarine sous la côte 410. Les miniatures sont dues au maître Jacques de Besançon.
La procession de la Fête-Dieu au cours de laquelle le célébrant porte une hostie dans un ostensoir – est généralisée dans tout l’Occident au XVème siècle. Les premières processions eucharistiques avec le Saint Sacrement apparaissent dès le XIème siècle et se situent tout d’abord au cours de la Semaine Sainte : on se met à porter le Corps du Christ lors de la procession des Rameaux, afin de mieux figurer l’entrée triomphale du Seigneur à Jérusalem. Le Vendredi Saint, après la messe des Présanctifiés, en beaucoup d’endroits on porte une hostie consacrée qu’on place dans un sépulcre (souvent, un groupe sculpté représentant une mise au tombeau), pour figurer l’ensevelissement du Christ, à l’instar des vêpres de l’ensevelissement du Grand Vendredi byzantin. Cette hostie est sortie du tombeau au petit matin de Pâques, après les matines pascales, et est portée triomphalement au cours de la procession pascale et rapportée au maître-autel. Cette procession de l’aurore du jour de Pâques est du reste la mère de toutes les processions de l’Eglise, elle rappelle la venue des saintes femmes et des disciples au sépulcre après la résurrection du Christ.
Lorsque la Fête-Dieu fut instituée en 1246 à Liège puis à Rome en 1264, et fixée au jeudi qui suit la Trinité, il s’agissait de reporter la liesse et la joie due à l’Eucharistie qui ne pouvait pas éclater librement au cours de la Semaine Sainte. Il est possible que l’idée de faire une procession avec le Saint Sacrement le jour de la Fête-Dieu soit d’origine française : les plus anciennes mentions qu’on puisse trouver remontent aux conciles de Sens de 1320 et de Paris de 1323 qui précise : “Quant à la Procession solennelle qui se fait le jeudi de la fête en portant le divin Sacrement, comme il semble que ce soit par une sorte d’inspiration divine qu’elle s’est introduite en nos jours, nous ne statuons rien pour le présent, laissant toutes choses à la dévotion du clergé et du peuple.”
Le Milanais Donat Bossius rapporte, en sa Chronique, que “le jeudi 29 mai 1404, on porta pour la première fois solennellement le Corps du Christ dans les rues de Pavie, comme il est passé depuis en usage.” L’usage se répand de là en Italie, les papes Martin V et Eugène IV, en leurs Constitutions de 1429 et 1433 mentionnent l’usage de la procession comme établi à Rome.
Mais revenons à cette miniature du missel manuscrit de Saint-Germain-L’Auxerrois : l’artiste nous dépeint une procession paroissiale dans les rues de Paris telle qu’elle avait lieu dans les années 1480 : les maisons à pans de bois sont pavoisées de tentures multicolores et de tapisseries.
Dans la tradition parisienne, la procession de la Fête-Dieu avait alors lieu après le chant de l’heure de prime, avant tierce et la grand’messe (tandis qu’au rit romain, l’usage s’est établi de faire la procession après la messe du jeudi de la Fête-Dieu). La couleur des ornements liturgiques sur cette miniature est bleue, toutefois les traditions sur les couleurs des ornements ne sont pas vraiment fixées au XVème siècle. Par la suite, les livres parisiens célèbreront la Fête-Dieu en rouge (contrairement au romain qui use du blanc). Du reste, le dais qui protège & honore le Saint Sacrement est de couleur rouge (comme souvent dans les miniatures représentant cette procession). Ce dais est orné du texte de l’introït de la messe, brodé en lettres d’or : Cibavit eos ex adipe frumenti – Il les a nourris de la fleur du froment.
Sous le dais rouge, le célébrant porte le Corps du Christ dans un ostensoir soleil, dont la forme est alors une innovation, on use encore volontiers des monstrances médiévales qui gardent plutôt la forme de reliquaires. Le célébrant en chasuble (et non en chape comme au romain) est assisté de son diacre et de son sous-diacre en dalmatique et en tunique. Devant le dais marchent deux chantres en chapes qui tiennent leurs processionnaux contenant les hymnes à chanter (le répons Homo quidam est chanté au départ de la procession dans l’église, puis les livres parisiens prévoient le chant des hymnes Verbum supernum prodiens, Pange lingua gloriosi & Sacris solemniis.
Le clergé et les assistants ont curieusement la tête couverte de ce qu’on appelait en vieux français des “bonnets de prêtres”, l’équivalent de nos barrettes actuelles, dont la forme pourrait se rapprocher de celle des mortiers des magistrats parisiens. L’usage de rester tête découverte en présence du Saint Sacrement ne s’est pas encore établie. Tous portent des flambeaux, (torches constituées de 4 cierges joints), la rubrique que tous portent ces flambeaux pour accompagner le Saint Sacrement a été conservée jusqu’aujourd’hui dans les livres liturgiques.
Ce Missel magnifiquement enluminé témoigne des derniers feux d’un art qui était alors condamné à disparaître : le premier missel parisien imprimé fut en effet réalisé en 1481, en même temps que cette somptueuse commande de Pierre de Cerisay, sonnant le glas d’un art pluri-séculaire porté à son zénith mais gage d’un nouveau mode de partage du savoir.
Addúxi vos per desértum quadragínta annos, ego Dóminus ; non sunt attríta vestiménta vestra : * Manna de cœlo plui vobis, & oblíti estis me, dicit Dóminus.
Je vous ai menés à travers le désert pendant quarante ans, moi, le Seigneur, & vos vêtements ne se sont pas usés : * J’ai fait pleuvoir du ciel pour vous la manne, & vous m’avez oublié, dit le Seigneur.
(Deutéronome XXIX, 5)
℣. Pópule meus, quid feci tibi aut quid moléstus fui ? Respónde mihi. Quia ego edúxi vos de terra Ægypti.
℣. Mon peuple, que t’ai-je fait ? Ou en quoi t’ai-je été désagréable ? Réponds-moi.
(Michée VI, 3)
* Manna de cœlo plui vobis, & oblíti estis me, dicit Dóminus.
* J’ai fait pleuvoir du ciel pour vous la manne, & vous m’avez oublié, dit le Seigneur.
Ce répons, le troisième du troisième nocturne du IVème dimanche de Carême dans l’ancien rit parisien, était également repris au cours de la procession qui précédait à Paris la grand-messe de ce dimanche. Son texte est tiré du Deutéronome et son verset, emprunté au prophète Michée, sera repris dans les Impropères du Vendredi saint. Ce répons fait partie du fond ancien du répertoire romano-franc : il figure dans l’Antiphonaire de Compiègne du IXème siècle (le plus ancien témoin complet du cursus romain de l’office divin) comme ultime répons de l’office nocture du IVème dimanche de Carême. Présents dans de très nombreux manuscrits médiévaux un peu partout en Europe, il n’a pas été retenu dans le Bréviaire romain de saint Pie V.
Minor sum cunctis miseratiónibus tuis, Dómine Abraham. In báculo meo transívi Jordánem istum : et nunc cum duábus turmis regrédior. * Líbera me, Dómine, de mánibus Esau quia valde contrémit cor meum illum timens.
Je suis indigne de toutes vos miséricordes, Seigneur d’Abraham. J’ai passé ce fleuve du Jourdain n’ayant qu’un bâton, et je retourne maintenant avec ces deux troupes. Délivrez-moi, Seigneur, de la main d’Esaü, parce que mon cœur le crains extrêmement.
(Genèse XXXII, 10-11)
℣. Tu locútus es quod mihi bene fáceres, et dilatáres semen meum sicut arénam maris.
℣. Vous m’avez promis de me combler de biens, et de multiplier ma race comme le sable de la mer.
(Genèse XXXII, 12)
* Líbera me, Dómine, de mánibus Esau quia valde contrémit cor meum illum timens.
* Délivrez-moi, Seigneur, de la main d’Esaü, parce que mon cœur le crains extrêmement.
(Genèse XXXII, 11)
Ce répons fait partie de la couche ancienne du répertoire de l’office romain, puisqu’on le trouve dans l’antiphonaire de Compiègne du IXème siècle, le plus ancien témoin complet du texte de l’office divin. Son texte est établi sur celui de l’histoire de Jacob Israël, dans le livre de la Genèse, qui est lue à l’office nocturne de ces jours du Carême. Ce répons a cependant progressivement disparu des différents usages diocésains médiévaux, il n’a pas été conservé par les Ordres religieux ni par le Bréviaire romain de saint Pie V.
L’usage de Paris l’a conservé en l’assignant à la procession dominicale qui précède la grand-messe du IInd dimanche de Carême.
Ductus est Jesus in desértum a Spíritu, ut tentarétur a diábolo : * et áccendens tentátor, dixit ei : Si Fílius Dei es dic ut lápides isti panes fiant.
Jésus fut conduit par l’Esprit dans le désert, pour y être tenté par le diable ; * et le tentateur s’approchant de lui, lui dit : Si vous êtes Fils de Dieu, dites que ces pierres deviennent des pains.
(Matthieu IV, 1 & 3)
℣. Et cum jejunásset quadragínta diébus & quadragínta nóctibus, póstea esúriit.
℣. Et ayant jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim ensuite.
(Matthieu IV, 2)
* et áccendens tentátor dixit ei si Fílius Dei es dic ut lápides isti panes fiant.
* Et le tentateur s’approchant de lui, lui dit : Si vous êtes Fils de Dieu, dites que ces pierres deviennent des pains.
(Matthieu IV, 3)
Ce répons, le troisième du troisième nocturne du Ier dimanche de Carême dans l’ancien rit parisien, était également repris au cours de la procession qui précédait à Paris la grand-messe de ce dimanche. Son texte est bien sûr tiré du début du IVème chapitre de l’évangile selon saint Matthieu, qui est lu à la messe du Ier dimanche de Carême. Présent dans de très nombreux manuscrits médiévaux un peu partout en Europe, ce répons ne figure plus dans l’office romain actuel.
Parlant à ses frères, Joseph dit : * Paix à vous, ne craignez point. C’est en effet pour votre salut que le Seigneur m’a envoyé avant vous. ℣. En pleurant, il éleva alors sa voix qui fut entendue des Egyptiens & de toute la maison de Pharaon. * Paix à vous, ne craignez point. C’est en effet pour votre salut que le Seigneur m’a envoyé avant vous. ℣. Gloire au Père, & au Fils, & au Saint-Esprit.
Parlant à ses frères, Joseph dit : * Paix à vous, ne craignez point. C’est en effet pour votre salut que le Seigneur m’a envoyé avant vous. (Genèse xlv, 5 & 2)
Dans le rit parisien, Loquens Joseph constitue le 9ème et dernier répons des vigiles du IIIème dimanche des Carême, au cours desquelles on lit l’histoire de Joseph vendu par ses frères, tirée du livre de la Genèse. Ce même répons est aussi utilisé dès les premières vêpres, comme répons après le capitule. Il sert pour la procession qui précède la grand-messe de ce dimanche. Il est enfin également répété aux secondes vêpres du dimanche. Il est donc au total chanté 4 fois aux offices de ce IIIème dimanche de Carême.